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Le village de Chokier

Les alunières de Chokier


Borne limite entre concessions.


Au 16 siècle, Chokier était une commune axée principalement sur la culture de la vigne. Cette culture nécessitait l'usage de l'Alun. En effet, le schiste alunifère ou ampélite (du grec "ampelos" = vigne, et "lithos" = pierre) était utilisé pour l'amendement des vignobles, tandis que l'Alun lui même entrait dans le collage des vins pour les clarifier en absorbant les impuretés et en précipitant.

La fin du 16 et le début du 17e siècle et les manifestations de l'essor qui marque cette époque voit la naissance des premières exploitations de l'alun. Le 15 mars 1586, le chapitre de la collégiale Saint-Pierre reconnaissait le droit de rechercher l'Alun à Flemalle-Haute. En 1606, se constituait l'exploitation de Chokier.

En mars 1606, on trouve mention d'alun à chokier dans de la correspondance envoyée à Gian Giacomo Barbiano di Belgioso (ou de Bellejoyeuse), 16 ème Seigneur de Chokier de 1602 à 1632, par sa seconde épouse, Anne de Pottier

En 1617, une alunière au Bois des Moines est mentionnée au moment où le Comte Jean Jacques Barbiano de Belgioso donne en location au Comte Jean de Marche 15 bonniers de terre appelés "bois de Horion".

A cette époque, le droit d'autoriser des thiers à exploiter le sous sol en vue d'en extraire des minerais appartenait de manière exclusive au seigneur. L'autorisation était accordée moyennant le prélevement au profit du seigneur d'une petite partie de la production annuelle. Au début, en matière d'alun,le redevance était de 1/15e de la production. Elle s'abaisse dans la suite à un 20e, 1/22e et parfois même 1/25e. Les seigneurs étaient fort intéressés au développement de ces exploitations car elle leur procuraient des ressources importantes sans qu'ils aient à courrir des risques commerciaux. Ils prétendaient exercer ce droit dans toute l'étendue de leur seigneurie, aussi bien sur les propriétés leur appartenant que sur celles d'autrui.

Léon Halkin, dans Itinéraire de Belgique (1623-1628) précise : " A coté du château, dans un fond, est une officine où l'on fait l'Alun de sable ou terre avec urine, qui vaut bien au château 6000 livres de rentes"

Ce développement de l'industrie entraînant un mouvement continuel de marchandises, avait fait de Chokier, un centre très fréquenté, pour le plus grand profit du commerce et de l'artisanat. A la fin du siècle, la fabrique de bateaux appartenant à Pasquai Donnea jouissait d'une grande réputation.

L'exploitation de l'Alun à Chokier, malgré de nombreux temps d'arrêt liés aux événements militaires qui se succédèrent sans interruption à la fin du siècle et au début du siècle suivant, se poursuivit jusqu'au début du 19e siècle, date à laquelle, elle occupait encore une centaine d'ouvriers.

A cette époque, les chimistes Chaptal et Curaudeau trouvèrent le moyen de fabriquer l'alun artificiellement. Celui-ci fut importé chez nous dans la 2ème moitié du 19ème siècle et porta un coup fatal aux alunières qui avaient eu jusqu'alors le privilège de fournir à l'industrie tout l'alun dont elle avait besoin.

De nos jours, nous pouvons encore apercevoir les terrisses, fondrisses, puits, et bornes liées à l'exploitation de l'Alun.

MARE ROUGE

Le chemin du château de Chokier faisait office de limite entre les concessions de l'alunière du Bois des Moines et de l'alunière du Houlbouse.

La méthode d'extraction par foudroyage consistait a creuser des galeries à travers les bancs dont on retirait l'étayage après exploitation. Cela avait pour conséquence un effondrement des terrains de surface appelé fondris. Il était toutefois interdit de prélever les schistes alunifères sous les voiries, bâtiments et champs cultivés.

Les deux mares de part et d'autre du chemin du château sont nées de fondris remplis d'eau. Elles hebergent aujourd'hui une faune et une flore particulièrement riche.


LA FABRICATION DE L'ALUN

Sorti du puits, le schiste alunifère était disposé en tas de 6 m de haut et 18 m de côté. On le laissait se déliter sous l'effet des agents atmosphériques pendant un temps très variable. Venait ensuite le grillage. Opération délicate entre toutes, le grillage avait pour but de transformer la majeure partie du soufre contenu dans le schiste en sels de fer et d'aluminium. On entassait alternativement lits de fagots et lits d'une soixantaine de cm d'épaisseur de schiste sur une hauteur allant jusqu'à six mètres. On boutait le feu et tout l'art de l'ouvrier consistait à obliger les vapeurs sulfureuses à traverser les couches supérieures et à ne pas s'échapper par les côtés. Il fallait veiller à ce que les eaux de pluie n'éteignent pas ce feu intérieur. L'opération durait au moins 10 jours. Après cela, de noir qu'il était au départ, le schiste était devenu rouge. On le conduisait alors dans des cuves où il était lessivé plusieurs fois. Une fois épuisé, on le retirait de la dernière cuve et on le transportait à proximité pour être entassé sur les restes précédents, en terrisses.


Terres rouges issues du grillage du schiste alumineux.

L'eau des cuves, fortement chargée en alun, par passages successifs au travers des schistes grillés, était conduite vers des chaudières où elle subissait une première cuisson. Ensuite, le liquide ayant acquis une certaine consistance, était amené vers des auges en maçonnerie où il reposait. Les impuretés déposées sur le fond, le liquide était repris et cuit une seconde fois. Là, on ajoutait un alcali, ce qui avait pour but de provoquer la précipitation de l'alun. Cet alcali était soit de la potasse ou de l'urine récoltée dans le village. Au fur et à mesure que le liquide diminuait, on ajoutait de l'eau claire pour le purifier et lui conserver une certaine fluidité. Il ne restait plus qu'à laisser s'écouler ce liquide épais dans des tonneaux où se réalisait la cristallisation. Au bout d'une huitaine de jours, on pouvait enlever les douves de ces récipients de 1.000 à 2.000 litres. La masse était encore laissée au repos 15 à 20 jours et ses parois atteignaient alors 25 à 30 cm. Au centre, il restait de l'eau qui n'avait pas cristallisé. Elle était récupérée et réemployée au lessivage ou à la cuisson. Il restait à diviser la masse en différents conditionnements et qualités.

Les maquettes illustrant le processus détaillé de la fabrication de l'Alun peuvent étre admirées dans les locaux de la Comission Historique de Flemalle
Renseignements: Mme Deleau - Tél. : 04/ 233 65 09

USAGES

Le schiste alunifère fut très tôt utilisé pour l'amendement des vignobles. Les Chinois se servaient des efflorescences d'alun comme médication et un papyrus fait état de la connaissance de l'alun par les Egyptiens. Au moyen âge, il était très utilisé dans l'industrie du textile pour fixer les couleurs sur les étoffes. Les tanneurs s'en servaient pour raffermir les peaux, les maroquiniers pour les teindre. Les mégissiers tannaient les peaux très souples avec de l'alun pour en faire des gants. Mélangé au suif, il dormait plus de fermeté pour la fabrication des chandelles. Au XVIIème Siècle, il entrait dans la composition des crépis apposés à l'extérieur des maisons. Ces crépis étaient imperméables et ne s'écaillaient pas. Les graveurs l'utilisaient pour la préparation de l'eau forte de Callot (estampe obtenue au moyen d'un support mordu par une solution d'acide nitrique). Dans les conserveries de morues, on consommait beaucoup d'alun pour la préparation du poisson à faire sécher. Il en était de même pour la conservation des gélatines. Il entrait dans la préparation de la laque, du papier (notamment le papier vélin), de certains verres (celui de Venise) et de la colle végétale. Les menuisiers pour teindre les planchers ou parquets en jaune ou en orange, n'y parvenaient qu'avec de l'alun. Dans les moulins, un mélange de borax et d'alun permettait de cimenter et de réparer les meules. Il clarifie bon nombre de liquides, en absorbant les impuretés et en précipitant. La médecine l'utilise comme astringent et antiseptique. On l'applique contre les aphtes et les boutons de fièvre. Placé dans le creux d'une dent, c'est un remède populaire contre la carie douloureuse. Enfin, on peut l'ajouter à l'eau d'arrosage pour faire bleuir les hortensias.

Comme on le voit, son utilité dépassait de beaucoup le cadre de l'après-rasage. Il constituait un produit industriel de première importance.

LES ALUNIERES A FLEMALLES
ET DANS LA VALLEE DES LA MEUSE
150 Pages

DISPONIBLE
A L'OFFICE DU TOURISME DE FLEMALLE
Tel. : 04/ 233.67.87.

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