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LIEGE - LEODIUM - LUYK - LÜTTICH

La Légia Etude toponymique
suite de " Les origines de la ville de Liège "

par Godefroid KURTH


I

Légia est le nom porté actuellement par le ruisseau qui, descendant des hauteurs d'Ans, pénètre dans la ville de Liège par le faubourg Sainte Marguerite, et, voûté depuis longtemps, passe sous le Palais, sous la place du Marché et sous l'Hôtel de Ville pour aller, par la rue du Rêwe, se déverser enfin dans la Meuse.

C'est ce ruisseau qui a donné naissance à la ville de Liège. Elle est née dans son vallon, elle a été le village de la Légia bien avant de devenir la ville de la Meuse. Là-dessus, il n'y a point de doute. Mais le ruisseau a-t-il aussi donné son nom à la ville, ou, pour préciser davantage, le nom de Liège dérive-t-il de celui qui désigna d'abord le ruisseau?

Dans mon mémoire sur les Origines de la ville de Liège, publié il y a quelque vingt-cinq ans (1), je l'ai vivement contesté. J'ai établi que Légia n'est qu'une dérivation érudite et non populaire de Leodium, que Leodium lui­même était primitivement Leudicum, que letidicus est un adjectif hybride formé à l'époque mérovingienne d'un radical germanique et d'une désinence latine, et dont le sens correspond identiquement à celui de publicus. J'ai établi ensuite que ce qualificatif, devenu le nom propre de la localité, rappelle que celle-ci faisait partie du domaine de l'Etat, à la différence des terres qui étaient devenues l'objet de l'appropriation privée. Enfin, j'ai supposé que ce nom, graduellement altéré au cours des temps par la prononciation locale ou par la fantaisie des érudits, s'était communiqué finalement au ruisseau, qui le portait depuis au moins 1118.

Pour plus de clarté, je résume en trois propositions la doctrine contenue dans mon mémoire de 1882.

1° Legia dérive de Leudicum;

2° Leudicum est un nom de terre et désigne un domaine de l'Etat; il n'est pas un nom de cours d'eau;

3° Par conséquent, la ville de Liège n'a pas emprunté son nom à son ruisseau, c'est le ruisseau qui a emprunté le sien à la ville.

De ces trois propositions, les deux premières sont, je crois, acquises à la science, et, depuis un quart de siècle, elles s'imposent à quiconque veut étudier le sujet. Il n'en est pas de même de la troisième.

Mes études toponymiques, poursuivies avec assiduité après le temps où parut mon mémoire sur les Origines de la ville de Liège, m'ont acheminé graduellement à des constatations inattendues. Je me suis rendu compte qu'il est impossible que le ruisseau n'ait pas porté de nom avant le village fondé sur ses bords. Deux lois d'ordre général, dont je n'avais pas conscience en 1882, s'y opposent absolument. La première, c'est que les noms de cours d'eau sont les plus anciens de la toponymie, et que nous voyons jusqu'aux moindres ruisseaux porter le leur dès les origines de l'histoire. La seconde, c'est qu'en général les cours d'eau ont passé leur nom à la plus ancienne localité née sur leurs bords. La conclusion qui se dégageait pour moi de cette constatation, c'est qu'il ne se peut pas que le ruisseau de Liège n'ait pas eu de nom avant la fondation de cette ville, et qu'il est hautement probable qu'il avait donné ce nom à celle-ci.

Je demande la permission d'insister sur ces deux faits. En ce qui concerne le premier, je renvoie le lecteur à la liste des noms de cours d'eau que j'ai dressée dans mon mémoire sur La frontière linguistique en Belgique et dans le nord de la France (2). On y verra qu'en Belgique, comme en France, en Allemagne et en Angleterre, le vocabulaire de l'hydronymie est à peu près totalement celtique ou pour mieux dire préromain (3); on y verra aussi que des ruisseaux aujourd'hui insignifiants et à peu près anonymes se voient, dès les débuts de l'historiographie, en possession de beaux vocables sonores. Tels sont aux VIIe et VIIIe siècles, la Cysindria à Saint-Trond, la Bebrona à Fosse, l'Andagina à Saint-Hubert, l'Alisna près de Cugnon, et un grand nombre d'autres dont j'épargne l'énumération au lecteur. Qui, aujourd'hui, connaît ces ruisseaux? Ils ont perdu leurs noms retentissants, et quand il est question d'eux, on ne les désigne que par les appellations les plus banales le Meulebeek, le ruisseau du Val de Poix, etc. J'ai d'ailleurs indiqué la raison pour laquelle les plus minimes cours d'eau ont joué anciennement un rôle si considérable dans la toponymie. « D'abord, dans les temps anciens, ou la plus grande partie du sol était occupée par des forêts, ils avaient plus d'importance comme volume d'eau et étaient plus souvent employés, en l'absence de routes, comme voies de circulation. Ensuite, au milieu des solitudes, ils frappaient davantage l'attention et étaient plus connus (4). Ces considérations s'appliquent parfaitement au ruisseau de Liège, d'ailleurs plus important par son volume que plus d'un de ceux que je cite. Comme eux, le ruisseau de Liège a dû porter un nom dès l'origine; ce nom, par suite, est antérieur à la ville, et il y a toute apparence qu'il est celtique ou, pour parler plus exactement, préromain (5),

Le second fait général qui a contribué à modifier mon opinion sur l'origine du nom de Liège, c'est, ai-je dit, que les cours d'eau ont généralement donné leur nom à la localité née sur leurs bords. Ici, les exemples sont innombrables, et il n'est, pour ainsi dire, pas un ruisseau qui ne vienne confirmer la règle. Obligé de me borner, je me contenterai de citer quelques exemples:

L'Alphen(Alfena) donne son nom aux villages de Bijdalphenbrugge, Alphenblock, Opalphen, Neeralphen et Teralphene.
L'Amblève ('Amal-ava) Amel (Prusse rhènane).
L'Arbre (Asbra) Arbre.
La Biesme (Bebrona) Biesme la Colonaise.
Le Biran Beauraing (ROLAND, Toponymie namuroise, t. I, pp. 26 et 143).
La Brame (Brakena) Braine-le-Comte, Braine-l'Alleu, Braine-le-Château, Wautier-Braine.
La Breuvanne Breuvanne (Tintigny).
Le Chiers (Carus) Oberkorn, Niederkorn.
Le Dion Dion-le-Mont, Dion-le-Val.
La Dyle (Tila) Tilly.
La Flône Flône.
Le Floyon Flavion (ROLAND, Toponymie namuroise, t. I, p.193).
La Gelbecca Jabbeke.
La Herpe (Arpia) Ter Herpen, Erpe.
L'Heure (Ora) Heure-en-Famenne.
Le Huy (Hoio, auj. Hoyoux) Huy.
L'Issche (Isca) Yssche.
La Lomme Lamsoul.
La Méhaigne Méhaignoul.
La Scara (auj. Maelbeek) Schaerbeek.
La Vive Vive Saint-Bavon et Vive Saint-Eloi.
La Voere (Fura) Tervueren.
La Zwalm (Sualma) Munckzwalm, Nederzwalm.

Il semblait donc légitime de conclure que le village né sur le ruisseau de Liège avait emprunté son nom à ce ruisseau. Et puisque la forme la plus anciennement connue du nom de Liège est Leudicum, il s'en déduisait que le ruisseau s'était appelé dans l'origine Leudicus ou Leudica.

Cette nouvelle manière de voir, à laquelle je me voyais conduit en quelque sorte malgré moi, a fini par transpirer dans la conférence que j'ai faite en 1905, à l'Exposition de Liège. Obligé, à ce moment, de me prononcer, sans pouvoir mettre le public au courant de mes hésitations et de mes doutes, je m'exprimai comme suit :

« Le nom de Liège apparaît pour la première fois dans l'historiographie à l'occasion de saint Lambert, évêque de Tongres-Maestricht.

C'était alors un village formé dans la gorge d'un ruisseau qui, descendant des hauteurs d'Ans, se jetait dans la Meuse. Ce ruisseau s'appelait le Liège, et, conformément à la loi générale de la toponymie, il a donné son nom au village (6)

Toutefois, au moment même où je formulais de la sorte le résultat de mes longues tergiversations, il me restait des doutes sérieux qui ne me permettaent pas de le considérer comme définitif. Si le nom de la ville dérivait de celui du ruisseau, qui, dans ce cas, devait nécessairement être Leudicus ou Leudica, il s'ensuivait que celui-ci devait de toute nécessité être tenu pour celtique. Or l'interprétation qui traduisait leudicus par publicus était garantie par, un ensemble si important de preuves qu'il paraissait difficile de la remettre en question. Et à supposer que je voulusse conserver cette interprétation, je devais, contrairement aux arguments d'ordre général qui avaient déterminé mon changement d'opinion, admettre que le ruisseau portait un nom germanique; je devais, de plus, admettre que ce cours d'eau s'appelait le ruisseau public, hypothèse des plus invraisemblables et même dépourvue de sens, car qu'est-ce qu'un ruisseau public? Autant le nom de Leudicum se justifiait s'il était donné à un fonds de terre, autant il devenait inexplicable et inadmissible si on l'attribuait à un ruisseau.

Il y avait, à la vérité, une autre hypothèse à faire; elle avait été faite, bien qu'avec une certaine hésitation, par Grandgagnage, et elle s'était présentée à mon esprit dès l'origine, mais je l'avais repoussée comme étant trop subtile. Elle consistait à admettre que le ruisseau s'était appelé de tout temps Legia, et que le village s'était appelé dès l'origine Leudicum. Leudicum s'étant, par la suite, transformé organiquement en Liège, ce nom se trouvait fortuitement présenter avec le nom du ruisseau une analogie assez grande pour que l'on pût se persuader, dans un temps où la science étymologique était ignorée, qu'ils dérivaient l'un de l'autre. Ainsi s'expliquerait qu'à partir du Xe siècle, les Liégeois qui écrivaient en latin aient imaginé de donner à la ville le nom du ruisseau, et d'employer les termes Legia et Liège comme équivalents, non seulement au point de vue du sens, mais encore au point de vue de la filiation. Mais cette hypothèse se heurtait à une impossibilité majeure. Si Légia était le nom primitif du ruisseau, ce nom, en s'altérant conformément aux lois phonétiques, ne pouvait produire en wallon que la forme Loie et jamais la forme Liège. Or, c'est toujours Liège et jamais Loie que les indigènes ont appelé le ruisseau dans leur langue. Je ne trouve pas, il est vrai, de plus ancien témoignage que celui de Jean d'Outremeuse; en revanche, celui-ci est surabondant et pleinement autorisé, puisqu'il parle de choses de son temps (7). C'est donc bien de Leudicum et non de Legia que nous devons faire descendre le nom du ruisseau. Cela suffit pour écarter définitivement l'hypothèse dont il vient d'être question, et il est superflu de faire valoir tout ce qu'aurait d'extraordinaire la coexistence fortuite de deux vocables qui seraient venus, à la longue, se fondre en un seul pour le plus grand tourment des toponymistes d'aujourd'hui.

On le voit, le problème restait sans solution, et ni mes vues de 1882 ni celles de 1905 ne faisaient disparaître l'obsédante énigme.

Je me remis de nouveau à l'étude. Je commençai par poser nettement devant moi les résultats acquis. D'une part, le nom primitif de la ville de Liège est leudicus; il remonte jusqu'à la fin du VIle siècle et il a un caractère germanique. D'autre part, le ruisseau porte, depuis au moins 1118, le nom de la ville (8). Mais, en conformité d'une loi toponymique vérifiée, il n'a pu le porter de toute antiquité. Il a eu, dans l'origine, son nom à lui, et ce nom, comme tous nos autres noms de cours d'eau, devait être un nom celtique ou tout au moins préromain. Conclusion: il avait changé de nom au cours des âges, et avait pris celui de la grande ville qui était née sur ses bords.

Cette conclusion était tellement simple, qu'il semble qu'elle eût dû me venir à l'esprit tout d'abord.

Rien, en effet, n'est plus fréquent dans la toponymie que le changement de nom des ruisseaux. De tous ceux qui ont vu naître sur leurs bords une grande ville, un seul, à ma connaissance, est parvenu à garder son nom: c'est la Wien, qui a imposé le sien à la capitale de l'Autriche (9). Mais les localités les plus modestes parviennent bien souvent elles aussi, à débaptiser leurs ruisseaux.

J'ai déjà cité la Cysindria qui est aujourd'hui le Molebeek et l'Andagina qui est aujourd'hui le ruisseau du Val de Poix; mais c'est par douzaines que je puis alléguer les exemples.

L'Alfena s'appelle aujourd'hui Bell, l'Arpia est devenue le Meulebeek, le Dion n'est plus connu que sous le nom de Pisselet, le Dulnosus se retrouve dans le Roannai, le Jodion dans le Mignat, la Poleda dans la Hoëgne, la Poleia dans le Bocq, la Scara dans le Maelbeek, la Suestra dans le Roode Beek, la Votra dans le Grootebeek, etc.

Il n'y a là rien d'étonnant.

Les ruisseaux de petit parcours ne sont guère connus et dénommés que par les habitants de la localité où ils coulent, et lorsqu'il se présente une circonstance historique qui amène ceux-ci à les désigner sous un nom nouveau, le nom ancien, n'étant pas protégé par l'usage des populations voisines, disparaît facilement. Les cours d'eau d'une plus grande étendue ne subissent pas cette destinée, parce que leurs noms font partie des vocabulaires d'un peuple entier et que celui-ci ne les modifie pas sans une cause des plus sérieuses.

Or, il n'y en a pas qui agisse avec autant d'énergie que la naissance de localités habitées. D'ordinaire, la première qui surgit prend le nom du ruisseau les autres reçoivent des noms empruntés à d'autres circonstances. Lorsque l'une d'elles conquiert une importance particulière et qu'elle devient comme la reine de son vallon, ce sera désormais d'après elle que le ruisseau sera connu. Je prends un exemple au Xe siècle. Un affluent de la Lys près de Deynze s'appelait Larugga; le village situé sur son cours portait le nom de Bacceningahem, c'est à dire demeure de Bakho ou des descendants de Bakko. Aujourd'hui, la Larugga est devenue le Bekkelingebeek, c'est à dire le ruisseau de Bacceningahem (10).

De pareilles transformations ne sont pas toujours faciles à constater, parce que très souvent le nom ancien du cours d'eau, devenu obsolète, manque dans nos documents; toutefois, lorsque nous voyons un cours d'eau porter un nom qui n'est et ne peut être absolument qu'un nom d'habitation, alors nous pouvons affirmer avec certitude qu'il en a perdu un plus ancien. Je prends pour exemple deux rivières luxembourgeoises: l'Attert et la Mellier; toutes deux portent les noms de villages situés sur leurs cours, et ces noms désignent et ne peuvent désigner que des domaines occupés par l'homme. Attert est primitivement Attenrode, c'est à dire Attonsart, ou le Sart d'Atton. Mellier (763, Maslario) appartient à la nombreuse famille des noms de lieu terminés en lar, dont le sens n'est pas encore fixé d'une manière précise, mais qui désigne certainement une étendue de terre (11).

On peut considérer les changements de nom dont je viens de parler comme l'application d'une espèce de loi, tant le phénomène est régulier et constant, et cette loi, voici comment je crois pouvoir la formuler

Les ruisseaux de petit parcours qui voient naitre sur leurs bords une localité de quelque importance passent généralement leur nom à celle-ci et en prennent eux­mêmes un nouveau, tiré de quelque circonstance relative à cette localité.

Celui-ci est souvent le diminutif de leur premier nom.

J'ajouterai que, dans le cas où le nom ancien a disparu sans que les documents en aient conservé la trace, il n'est pas impossible de le retrouver. D'ordinaire, ainsi que je l'ai marqué plus haut, il se conserve dans le nom d'un des villages situés sur son parcours. Le procédé à suivre pour le restituer à la science est bien simple sur une bonne carte, on relève toutes les appellations de lieux habités qu'on rencontre sur son chemin, on constate la langue à laquelle ils appartiennent, et s'il y a moyen, on en fait l'étymologie. Cette opération laisse généralement subsister dans la liste au moins un nom indéchiffrable dont ne rendent compte ni les langues romanes, ni les langues tudesques, qui est, par conséquent, celtique ou préromain et qui est le nom primitif du ruisseau.

Appliquons à la Légia, c'est à dire au « ruisseau de Liège », le procédé que je viens de décrire, et voyons si dans son vallon nous ne rencontrerons pas, caché dans quelque hameau, le nom primitif qu'il s'agit de retrouver. Eh mais! Il n'y a pas à chercher longtemps: voici que se présente d'emblée à nous, à la source même de la Légia, un nom authentiquement celtique, et qui est, au témoignage unanime des celtisants, un des plus fréquemment employés pour désigner un cours d'eau. Ce nom est celui de Glain.

Glan, dit un maître (12), est un radical qui signifie pur, limpide; il reparaît dans le nom de cours d'eau Glana ou

Glanis, qu'on rencontre dans presque tous les pays habités autrefois par les Celtes; son équivalent germanique est Hlûtra, Lûtra (aujourd'hui Lauter) qui se retrouve souvent dans le composé Lauterbach. Glan se traduirait donc dans le vocabulaire toponymique roman par La Claire Eau.

Je crois utile, pour former la conviction du lecteur, de lui communiquer ici la liste des glan ou glain telle qu'il m'a été possible de la dresser avec les matériaux qui étaient à ma disposition. Est-il besoin de dire qu'elle est bien loin d'être complète?

1. Le Glain, nom ancien de la Salin, affluent de l'Amblève à Trois-Ponts. (670. Glanis) HALKIN et ROLAND, Recueil des chartes de Stavelot-Malimedy, t. I, p. 22. Sur ce cours d'eau se trouvait un village du nom de Glaniaco mentionné en 720, en 888, 915 et 1004. - Les mêmes, t. I, pp. 128 et 201.

2. Le Glan, affluent de la Lesse dans le bois de Bestin, au sud de Resteigne. ROLAND, Toponymie namuroise, t. 1, p. 195.

3. La Glenelle, affluent de la Marne, passant à Glannes. LONGNON, Dictionnaire topographique du département de la Marne, pp. 117 et 124.

4. La Glenne, affluent du Déron (Mayenne), séparant le département de la Mayenne de celui d'Ile et Vilaine. Léon MAITRE, Dictionnaire topographique du département de la Mayenne, p. 148.

5. Le Gland (1258 Glans, 1260 Glan, 1300 Glant) affluent de l'Oise à Hirson. MATTON, Dictionnaire topographique du département de l'Aisne, p. 124.

6. Le Glanon, sous-affluent de l'Isère. BRUN-DURAND, Dictionnaire topographique du département de la Drôme, p. 162.

7. Le Glan, affluent de l'Ems, arrosant sur son parcours les villages de Glandorf et de Glane.

8. Le Glan, affluent de la Nahe. GANNABICH, Lehrbuch der Geographie, 18e édition, t. I. p. 816.

9. Le Glan, Bavière. HOLDER, Altkeltischer Sprachschatz.

10. Le Glan, affluent du Gurk (Autriche). OESTERLEY, Historisch-geographisches Woerterbuch des deutsche Mittelalters, p. 215.

11. Le Glan, affluent de la Drave, près de Klagenfurt. HOLDER, o. c.

12. Le Glan, affluent de la Salzach près de Salzbourg. HOLDER, o. c.

13. Glan, nom d'un lac en Suède près de Norrköping.

14. Le Glan, affluent de la Saane à Hauterive, canton de Fribourg, en Suisse. HOLDER, o. c.

15. Glanis, nom d'un cours d'eau en Espagne cité par Mienne de Byzance. HOLDER, o. c.

Voilà, sans doute, une collection déjà respectable d'exemples qui serait singulièrement grossie, si l'on voulait y ajouter tous les cours d'eau dont le vieux nom de Glan, abandonné par eux, se retrouve dans celui de quelque localité située sur leurs bords. Les villages du nom de Glambach et de Glambeck sont nombreux dans l'Allemagne septentrionale et orientale, les Glennes et les Glain ne manquent pas en France, et une liste complète de tous les noms issus du radical glan nous ferait voir notre vocable toponymique dans une aire de diffusion étonnamment large.

Mais l'intérêt de ma démonstration n'exige pas un tel luxe de recherches et de preuves. Je m'en tiens à l'objet propre de ce mémoire et je conclu:

Le village actuel de Glain a conservé le nom perdu par le ruisseau qui y passe, et que les érudits connaissent aujourd'hui sous celui de Légia. La Légia a porté primitivement le nom de Glain, comme tant d'autres cours d'eau de notre pays et de l'Europe centrale et occidentale.

Ce nom, elle ne l'a pas donné directement au village, comme on pourrait le croire. Elle l'a d'abord communiqué à la forêt dans laquelle elle jaillissait, et qui, pendant les douze premiers siècles de l'ère chrétienne, couronnait de ses majestueux ombrages la source de notre ruisseau. Nous apprenons à connaître cette forêt pour la première fois en 1204, l'année même, hélas où elle allait tomber sous la cognée du bûcheron. Le chroniqueur Renier consacre une mention émue à ces beaux ombrages sous lesquels il avait peut-être joué pendant son enfance: « Cette année (1204) fut vendue et défrichée la belle et antique forêt de Glain, dont le voisinage faisait l'ornement de la ville; du prix de vente on fit trois parts dont l'une fut donnée à l'évêque, la seconde au chapitre, la troisième à la Cité pour bâtir les murs et les tours de son enceinte (13) ».

Toutefois, il existe une plus ancienne mention de la forêt de Glain; elle est faite à l'occasion de la fondation de l'église Saint-Nicolas, qui devait servir de sanctuaire au hameau bâti dans la forêt: ecclesie Sancti Nicolai in Glano, quae tam fundi quam aediflcii jure nostra est, dit en 1151 une charte de l'abbaye de Saint-Laurent (14). Le hameau que desservait cette église était lui-même désigné comme étant in Glano, en Glain, preuve qu'il emprunte bien son nom à la forêt (15).

Le village de Glain près de Liège n'est d'ailleurs pas le seul exemple belge qui nous offre le nom de ruisseau Glanis transporté à une localité. Sur une des sources de la Salm, qui, comme on l'a vu plus haut, s'appelait Glain au haut moyen âge, nous avons rencontré le très ancien village détruit de Glaniaco, qui s'appellerait aujourdhui Glagny (V ci-dessus, p. 134, n° I).

Si Glagny existait encore, et si nous ignorions que la Salm s'appelait autrefois le Glain, le groupe Glagny-Salmn constituerait le même problème de toponymie que Glain­Légia. Et un toponymiste pourrait, par voie d'induction, conclure que Glagny (Glaniaco) contient le nom primitif du ruisseau qui passe par ce village. Il appliquerait en ce cas la méthode que j'applique à Glain-Légia. Or, il se trouve que l'induction aboutit à une certitude pour GlagnySalm. Qui ne voit à quel point l'induction Glain-Légia y gagne elle-même en vraisemblance?


II

Je pourrais m'arrêter ici, car la seule chose qui m'importait, c'était de résoudre le petit problème toponymique offert par le nom de la Légia. Mais puisque j'y suis, j'achèverai l'histoire du nom de ce ruisseau, les particularités que j'ai à faire connaître ayant, à ce qu'il me semble, de l'intérêt non seulement pour l'érudition locale, mais aussi au point de vue de la toponymie en général.

La substitution du nom de Liège à celui de Glain n'est pas la seule vicissitude par laquelle ait passé la destinée du ruisseau de Liège. Tout le monde, au moyen âge, ne l'a pas désigné sous le non de Légia, et souvent on s'est borné à dire le ruisseau du marché. Un acte de 1294 cite une « maison ki siet sor le riwe à Saint Servais » (16). En 1340, un acte d'Adolphe de la Marck parle du « parvus nivus retro palatium nostrum fluens » (17) et vers la même époque, Jean de Warnant parle d'un meurtre commis « secus rivum in foro rerum venalium civitatis » (18). Jean d'Outremeuse lui-même, si soucieux de donner à toute chose son nom, s'oublie plus d'une fois à mentionner la Légia sous la simple désignation de ruisseau (19). Dès le XVIe siècle, le nom de notre cours d'eau semble être disparu de la langue populaire, et seuls les érudits lui gardaient une existence factice (20)

Etant donné la diffusion restreinte et la fixité imparfaite du nom de Liège comme appellatif du ruisseau de Liège, il est facile de comprendre que d'autres désignations encore aient pu naître et jouir de quelque popularité locale. Je ne m'amuserai pas à les rechercher, mais je me bornerai à attirer l'attention sur une seule, à cause de son intérêt étymologique et aussi de sa diffusion relativement considérable. C'est celle de Merchoul. Merchoul est un vocable presque aussi anciennement employé et dans tous les cas beaucoup plus usité que celui de Légia; on y rencontre la vraie forme populaire du nom de notre ruisseau, le nom de terroir, si je puis ainsi parler, tel que de tout temps il retentit sur les lèvres des botresses de la cité.

Je donne ci-dessous, dans leur ordre chronologique, les principaux passages dans lesquels apparaît le nom de Merchoul, depuis sa première mention en 1218 jusqu'à Jean d'Outremeuse (+ 1400) inclusivement.

1218. « Ecelesia beati Lamberti habet unum molendinum situm super rivum qui dicitur Merdecuel. »

BORMANS et SCHOOLMEESTERS, t. I, p. 183,

1296. « Le englise del Magdalene sor Merchul. »

Charte des Dominicains aux Archives de l'Etat à Liége, citée par GOBERT, II, 420.

1299. Molin qui siet en Liege sus le riu de Merdecuel.

BORMANS et SCHOOLMEESTERs, t. II, p. 557.

XIIIe siècle. Magdeleine sor Merchu, sor Merchuel.

Pauvres en Ile, reg. I, foll. 75 et 83, aux Archives de l'Etat à Liège.

1304. Maison qui siet delez le molinel sur Mierchuel.

Cartul. St-Jean, reg. 457 fol. 74 v. aux Archives de l'Etat, à Liège, cité par GOBERT, l. c.

1338. Une maison a touttes ses appendisses seante sur Merlechue devant la Madalene.

BORMANS et SCHOOLMEESTERS, III, p. 526.

1356. Une maison ... seans sur Merlechul.

LES MÊMES, III, p. 224.

1357. Sor le riu desor Mielchuel.

LES MÊMES, IV, p. 259.

1372. Une maison .... seante son Mielchoul à Liége.

LES MÊMES, IV, p. 491.

1372. Maison ... seante sur le riwe desor Merchuel en Liége.

LES MÊMES, IV, p. 497.

1372. Maison ... seante sur Merchuel devant le Magdalene.

LES MÊMES, IV, P. 498.

1375. Johan de Flemale prêtre, vesti de la Magdalene sur Mierchou.

LES MÊMES, IV, p. 520.

1381. Grande maison qui siet sor Mielchuel à Liége.

LES MÊMES, IV, p. 601.

1383. Maison seante sus Merchul.

LES MÊMES, IV, p. 614.

1384. Maison ... faisant le coron desour Merchoule.

LES MÊMES, IV, p. 624.

Que signifie ce nom de Merchoul donné à notre ruisseau? D'accord avec Jean d'Outremeuse - une fois n'est pas coutume - mais pour d'autres raisons que lui, je l'ai dérivé de matricula, nom donné dans l'origine, selon moi, au quartier de la Cité où demeuraient les pauvres secourus par la matricule de la cathédrale, et transporté ensuite, par métonymie, au ruisseau qui traverse ce quartier (21). M. Gobert s'est inscrit en faux contre cette étymologie et en produit une dont le parfum de terroir est plus prononcé: la Merchoul ou Merdecuel, comme porte une variante, ne serait autre chose qu'une fosse à... engrais humain (22).

Cette étymologie, que l'auteur défend à grand renfort d'arguments, les uns bons, les autres mauvais, se présente, au premier abord, comme assez spécieuse en effet, la première et la troisième des mentions datées du nom portent Merdecuel (23) et la première devance de presque un siècle toutes les autres! Toutefois, la valeur de cet argument apparaîtra fort affaiblie par cette circonstance que les deux mentions n'en forment en réalité qu'une seule, puisqu'elles se rapportent l'une et l'autre à un même bien, à savoir à un moulin situé sur le ruisseau, et que les rédacteurs du second acte, étrangers à Liège (ce sont les moines d'Orval), paraissent s'être conformés à l'orthographe adoptée par ceux du premier. Dans aucun cas, leur version ne peut être invoquée dans le débat. C'est à Liège et non à Orval que nous devons demander les documents justificatifs de l'usage liégeois.

Quant aux rédacteurs du premier acte, je ne puis me défendre de croire qu'ils ont commis une de ces bévues ou un de ces jeux de mots qui sont si fréquents dans l'onomastique du moyen âge, et que l'érudition moderne a classés dans une catégorie à laquelle elle donne le nom d'étymologie populaire (24). Elle consiste dans l'altération plus on moins inconsciente d'un nom de manière à l'identifier avec tel autre mot dont il se rapproche quelque peu, et qui a un sens dans la langue usuelle. Je n'étonnerai personne en disant que l'étymologie populaire s'est particulièrement complu à la déformation de vocables qui présentaient plus ou moins de ressemblance avec le mot immortalisé par Cambronne. Sur les cartes de l'état-major on trouve dans la forêt d'Ethe une fontaine de la Merdeux; cela n'a pas même de sens, mais c'est l'altération de Mère Dieu, nom que l'idiome local prononce Mère Dûeu! Et, pour citer un autre exemple, quel mal ne se sont pas donné certains historiens révolutionnaires pour prouver que le gendarme Méda, qui tira sur Robespierre le 10 thermidor, s'appelait Merda!

Le travail de l'étymologie populaire n'est d'ailleurs parvenu à altérer que la première partie du mot: cuel ou choul lui a échappé. Car de soutenir que ce suffixe représenterait en wallon le germanique kaul ou cuyl qui signifie fosse, c'est une affirmation sans preuve et qui doit être laissée pour compte à M. Gobert (25)

Je ne saurais pas non plus admettre avec M. Gobert que la Merchoul fût souillée par les déjections au point de mériter le nom peu flatteur qu'il revendique pour elle. Lui-même reconnait que le chapitre de la cathédrale et la Cité veillaient à la propreté de ce cours d'eau, et il serait intéressant, si je ne craignais d'abuser de la patience des lecteurs, d'énumérer ici les mesures de police qui furent prises plus d'une fois dans ce but. Mais, dit M. Gobert, « aucune prescription ne défendait la partie aval du ruisseau contre les abus signalés » et c'est cette partie aval, en conséquence, qui a mérité le nom de Merdecoul attribué par la suite au cours d'eau tout entier. Je ne saurais admettre ce raisonnement. C'est le cours du ruisseau tout entier, en tant qu'il traversait la Cité, qu'il importait de protéger contre les souillures; il faudrait prouver le contraire pour être autorisé à faire une exception au détriment d'une de ses parties.

M. Gobert voudrait localiser le nom de Merchoul aux environs de l'endroit où ce ruisseau tombe dans la Mense, vu que, comme il le reconnaît lui-même, la partie d'amont de son cours était protégée par des prescriptions sévères. Mais l'acte de 1299 (26) invoqué par lui atteste le contraire, car le moulin dont il est question, et « qui siet en Liege sus le rive de Merdecuel était situé dans la paroisse Saint-Servais: molendinun Sancti Lamberti in parochia Sancti Servatii Leodiensis, comme dit un autre diplôme de 13oo (27)

Par conséquent, au moins à partir de 1299, le nom de Merchoul était porté par tout le cours du ruisseau, depuis son entrée en ville jusqu'à son confluent avec la Meuse (28), et l'hypothèse de M. Gobert s'évanouit.

Quoi qu'il en soit d'ailleurs, le nom de Merchoul lui-même, le troisième qu'à ma connaissance notre ruisseau a porté au cours de l'histoire, a fini par disparaître à son tour. A partir de la fin de l'ancien régime, je ne le rencontre plus.


CONCLUSION.

La succession des noms divers sous lesquels apparaît dans l'histoire le ruisseau qui a donné naissance à la ville de Liège est une page d'histoire toponymique bien instructive. En voici le résumé.

Les populations celtiques du vallon de Liège ont donné à leur ruisseau le nom de Glain (Glanis), c'est à dire la Claire Eau. Ce ruisseau a donné d'abord son nom au village né sur ses bords, et qui s'appela comme lui Glain. Mais lorsque le village fut devenu une ville, et qu'il eut pris le nom de Leudicum, il communiqua à son tour ce vocable romanisé au ruisseau; et celui-ci s'appela Liège comme la ville.

Toutefois, l'identité de ces deux appellations ne fut jamais complète et engendra d'ailleurs des confusions; aussi s'habitua-t-on de bonne heure à désigner le ruisseau par un autre nom, celui de Merchoul, qui désignait le principal quartier de la ville où il coulait. Le nom de Merchoul, à son tour, disparut de la circulation au fur et à mesure que le ruisseau lui-même, voûté sur tout son parcours, disparaissait aux yeux des habitants.

C'est seulement vers sa source, là où il coule encore à ciel ouvert, qu'il a continué d'avoir un état-civil: ses riverains d'Ans l'appellent le ri de Coqfontaine. Quant aux érudits, lorsqu'ils se sont occupés à leur tour de ce cours d'eau historique, ils ont été fort embarrassés de le dénommer. Glain était oublié, Merchoul trop récent, Ri de Coqfontaine trop local, Liége trop exposé à la confusion. Ils imaginèrent alors de reprendre la forme latine Legia, la plus ancienne à leur connaissance, mais qui n'a jamais vécu sur les lèvres du peuple et qui n'a eu qu'une existence livresque. Et c'est ainsi que tour à tour, sous les vocables Glain, Liege, Merchoul et Légia, notre ruisseau a traversé l'histoire de la Cité depuis son origine jusqu'au XXe siècle.

Quod erat demonstrandum.


(1) Dans le Bulletin de la Société d'art et d'histoire du diocèse de Liege (BSAHL,), t. II (1882).

(2) Mémoires couronnés de l'Académie royale de Belgique, coll. in-8°. t. XLVIII, volume I, pp. 434-473, et volume II, p. 96-98.

(3) Depuis lors, dans le chapitre III de son magistral ouvrage sur la Toponymie namuroise (pp. 65-213), M. le chanoine Roland a repris la question pour la province de Namur et l'a en quelque sorte épuisée.

(4) Ouvrage cité, volume lI, p. 96.

(5) Je dis « celtique ou préromain », parce que, s'il est certain que la grande majorité des noms de nos cours d'eaux sont empruntés au vocabulaire celtique, il n'est pas prouvé que quelques-uns ne puissent pas avoir une autre origine, plus ancienne. Cf. La frontière linguistique. etc........ t. I. p. 435, avec la note I.

(6) La Nation Belge, 1830-1905. Conférences jubilaires faites à l’Exposition Universelle de Liège en 1905. Liège-Bruxelles, s. d., p. 23.

(7) « Sour la rivière que ons nomme Liége », Jean d'OUTREMEUSE, Ly Myreur des Histors, t. II, p. 55.

« Tout contreval le riwesel qui estoit nommeit Liege », Id. o. c., t II, p. 312.

« Une bonne et petite viihete que li evesque et li peuple nommarent Liége, selone le nom du riwesel qui estoit nommeis Legia», Id. o. c., t. II, p. 312.

(8) Voici les principaux textes :

« 1118 Pontes fregit et edificia Rivus noster cui nomen Leggia ».

Chronique de 1118 dans Monumenta Germaniae historica (MGH,) Scriptores (SS), t. XII.

« 1250 (circa). Edificavit ecclesiam super rivum Legiam ad honorem sancti Servatii ».

MGH, SS. t. XXV, p. 130.

(9) Vienne, en effet, vient de Wien et non d'un prétendu Vindobona V. GRIENBERGER, Vindobona. Wienne. Eine etymologische Untersechung (Sitzungsberichte der philos.-histor. Classe der K. Akademie der Wissenschaften, t. 130, Vienne, 1894).

(10) « In loco nuncupante Bacceningim secus fluviolum Larugge. »

Liber traditionum S. Petri Blandiniensis, éd. Fayen, p. 22.

(11) G. KURTH, La frontière linguistique, etc., t. I, p 288,

(12) GLÜCK, Die bei Caius Julius Caesar vorkommenden keltischen Namen, p. 187, note I. -. Cf. K. MÜLLENHOFF, Alterthumskunde, t. II, p. 227; BUCK, Oberdeutsches Flurnamenbuch, p.85 (Glan, Flussname, vordeutsch, keltisch glan, lauter, rein); ROLAND, Toponymie namuroise, t. I, p. 195; A. HOLDER, Altkeltischer Sprachschatz, s. v. glan; JOYCE, Irish names of places, first series, p. 429; vol. II, p. 398. Ce dernier auteur distingue d'ailleurs entre glan = ruisseau et glen = vallée; il serait intéressant de connaître le rapport étymologique entre ces deux vocables.

« 1292 Dominus Egidius de supra Legiam ».

BORMANS et SCHOOLMEESTERS, Carlulaire de l'église Saint-Lambert, t. II, p. 492.

« XIIIe siècle. Domus supra Legiam ».

Passim dans l'Obituaire de Saint-Denis, d'après GOBERT, Les Rues de Liège, t. II. 228.

(13) Silva puIcherima quae Glanum vocabatur, quae ad decus civitatis erat vicina et antiqua, hoc anno venditur et exstirpatur, cujus pretium in tres partes dividitur: prima cedit episcopo, secunda operi monasterii Sancti Lamberti, tertia muris et turribus civitatis» RENIER, Annales, dans MGH, SS., t. XVI.

Ce que Jean d'OUTREMEUSE, IV, P. 579, traduit ou paraphrase connue suit: « Et pour chu faire furent vendus li bois c'on appelloit li bois de Glain, qui astoit li plus beais forest d'arbres grosses et beals qui fust en cent lieuwes tout autour, et anchois que Tongres la grande fust faites astoit chis buis, et enu astoit li Cité bien parée et enforchie. »

(14) MARTÈNE et DURAND, Amplissiima Collectio, t IV, col, 1008.

(15) 1334. La voie dont on vat à S. Nicolay eu Glen (Cartul. de Saint-Lambert. t. III, 438).

1386, Maison située en Glen. SCHOONBROODT, Inventaire des chartes de Val Saint-Lambert, t. I, n° 71, p. 283.

1444. Individu demeurant en Glent ... maison située en Glent sur le grand chemin. Id., o. c., t. I n° 1234, p. 448.

Cf. GOBERT, Les Rues de Liège, t. I, p. 580, qui d'ailleurs a tort d'écrire en parlant de notre foret: « Cet endroit n'était alors qu'une foret très serrée de chênes. On l'appelait forêt de Glain, par suite, assurément, des nombreux fruits de ces arbres qui jonchaient le sol. »

(16) Pauvres en Ile, reg. 13 f. 150, aux Archives de l'Etat à Liége.

(17) BORMANS et SCHOOLMEESTERs, t. III, p. 572.

(18) Dans la Chronique liégeoise de 1402, p. 179.

(19) « Li roy Humbier avoit a son temps fondeit des beals molins sur le rivière qui corroit par deleis Ains. » Jean d'OUTREMEUSE, t. I, p. 215. -

(20) C'est ce qu'indique Ortelius, qui passa par Liège à la fin de ce siècle « Legia. Voluntque nonnulli sic appellari rivulum qui per forum fluit ex proximis ortum ducens collibus. » (Itinerarium, p. 19). Un témoignage aussi sérieux dispense de tenir compte de celui du mystificateur Hubert Thomas, écrivant vers la même époque: « Interfluit Legia fluviolus pueris in urbe notus . (De Tungris et Eburonibus, p. 92).

(21) Voy. mon Notger de Liège, t. 1, pp. 167 et 168, avec les notes.

(22) Th. GOBERT, Un antique nom topographique de Liége: Mechoul. BIAL., t. XXXV, 1905, pp. 140-154.

(23) M. Gobert, revenant sur la question dans son récent mémoire intitulé La plus ancienne enceinte de Liège, déclare qu'il a «rencontré plusieurs exemples de cette leçon Merdecoul dans les archives locales du XIIIe siècle encore, qui viennent corroborer mon opinion à ce sujet ». Mais il ne cite que le texte de 1299, visé ci-dessus. S'il en a d'autres, que ne les produit-il? Ce serait le moyen de me fermer la bouche bien mieux qu'avec ses raisonnements.

(24) Pour prouver à M. Gobert que je ne conteste pas en principe l'emploi du vocabulaire scatologique dans la toponymie liégeoise, je livre à ses savantes recherches le nom d'un fluvius Merdizus que je rencontre dans le Cartulaire manuscrit de Saint-Laurent, t. I, fol. 1 (aux Archives de l'Evêché de Liège), mais dont le parcours topographique m'est inconnu.

(25) Il y a un essai de preuve, mais qui ne vaut rien « Le mot coul provient de l'ancien germanique qui était encore parlé chez nous au Xe siècle, peut-être au XIe, conjointement avec le roman wallon ». BIAL, XXXV. p. 152. Si chez nous veut dire dans la Cité de Liège, comme il y parait bien, il faut repousser l'affirmation avec la plus grande énergie. Ni au Xe, ni au XIe siècle un dialecte germanique n'a été parlé conjointement avec le wallon par la population de Liège. Et quand M. Gobert invoque, comme preuve de l'usage des mots hybrides dans le roman de Liége, le nom de Coronmeuse, je suis obligé, encore une fois, de le l'envoyer aux romanistes.

(26) BORMANS et SCHOOLMEESTERS, t II, p. 557.

(27) LES MÊMES, t. II, p. 578.

(28) C'est ce que reconnaissent, l. c., MM. Bormans et Schoolmeesters, qui d'abord, sur la foi de M. GOBERT (Les Rues de Liège, t. II, p. 420), avaient admis que ce moulin était le Moulin aux Tripes dans la rue de la Madeleine.

(29) M. le Secrétaire de l'institut archéologique liégeois veut bien me communiquer un mémoire manuscrit de M. E. Polain, qui croit pouvoir démontrer que le cours actuel de la Légia ne représente plus le cours primitif, et qu'il se confond avec « l’arène du Val­Saint-Lambert. Je n’ai pas la compétence requise pour traiter cette question, d'ailleurs étrangère à mon sujet.

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