WWWCHOKIER


Notre Dame de Saint Remy

Son histoire et son culte

par L Hendrix

Eglise Saint Remy

L'église de Saint‑Remy s'élevait à l'angle de la place Saint‑Jacques et de la rue du Vertbois, mais avançait assez bien sur la place jusque près du porche de l'église Saint‑Jacques. Son cimetière, qui l'entourait presque complètement, s'étendait surtout le long de la rue du Vertbois.

Petite église à peu près contiguë à la célèbre Abbaye de Saint‑Jacques, elle était l'église paroissiale du groupe d'habitants que le voisinage du monastère avait attirés là. Telle était sa raison d'être.

Lorsque, en 1015, l'évêque Baldric Il choisit la partie sud‑ouest de l'île pour y bâtir le nouveau monastère de Saint‑Jacques, ces terrains étaient encore incultes et sauvages, couverts de broussailles et fréquemment ravagés par les inondations. Mais à l'ombre de l'abbaye vint se grouper une assez grande population: tout monastère, étant comme une école d'arts et de métiers, attirait les artisans; y venaient aussi les ouvriers au service de l'abbaye, les préposés aux celliers et aux greniers (2) s'occupant des revenus en nature, et ainsi autour du monastère s'établissait une collectivité laïque relativement considérable. Leur première église fut l'église abbatiale.

Bientôt, préférant garder son église à l'usage exclusif des moines, l'abbé bâtit dans le voisinage immédiat une chapelle pour assurer le service paroissial: l'église Saint‑Remy. Dès 1040, sous la prélature d'Olbert de Gernbloux, le premier chef de l'abbaye, on procéda à l'érection de Saint‑Remy: les deux institutions sont donc pour ainsi dire contemporaines.

La petite église paroissiale était d'architecture romane. Comme elle était située sur le terrain de l'abbaye, dans les immunités claustrales, l'abbé de Saint-Jacques en resta toujours le curé principal: à lui revenait de droit la collation de la cure. L'abbé Hermann (1185-1188) dans un règlement, que confirma l'évêque de Liège, Raoul, en 1187, fixe les droits et les obligations du curé de la paroisse. Cet ecclésiastique, qui était comme le vicaire de l'abbé pour le ministère paroissial, était considéré aussi comme membre de la communauté religieuse. Il devait au monastère une redevance annuelle de 40 deniers (40 solidos publice monete); comme un bon moine, il devait assister aux offices conventuels lors des principales fêtes; mais en revanche chaque fois qu'il était tenu à l'assistance au choeur, il avait droit au diner des moines; à la mort de l'abbé, il avait droit à tous les repas des moines pendant une année entière, et à la mort d'un frère, cette prébende monacale lui était servie pendant 30 jours (3)

Aux siècles suivants l'histoire de la paroisse ne présente aucun fait marquant: on cite de temps en temps le nom d'un curé, tel ce jean Clermontier, qui en 1500 bâtit la maison pastorale vers la place Saint-Jacques sur une parcelle du cimetière; tel ce Noël Hardy, qui en 1619 fit la visite « mainage par mainage » et nous a laissé la liste de ses paroissiens. Pour le reste, la vie paroissiale de Saint‑Remy ressemble à celle des autres petites paroisses de Liège, dont les pauvres églises contrastaient avec les superbes collégiales voisines.

Au XVlle siècle sous le pastorat de Jean Henri Manigart, Saint‑Remy acquiert certaine notoriété.

L'église possédait une statue de Notre‑Dame des Douleurs, tenant le corps inanimé de son Fils. Vers 1643, le culte de Notre‑Dame Consolatrice des Affligés prit un développement extraordinaire, surtout depuis que de nombreuses guérisons attiraient les foules à tel point que Notre‑Dame de Saint‑Remy était invoquée dans toute la principauté de Liège.

Ce concours de pèlerins profita en tout premier lieu à l'église elle‑même. L'édifice roman tombait en ruines. Et le curé Manigart (4) nous dit que « cette église paroissiale de Sainct Remy, pauvre, destituée d'ornements et presque toute ruinée semblait estre inhabitable aux hommes, mais non à la Vieige, laquelle a le pouvoir de changer bientost une tanière de serpens en un Paradis terrestre. »

Le bon Manigart pouvait parler ainsi, car les faveurs spéciales de Marie allaient lui permettre de rebâtir l'église. Dès 1643, il mit la main à l'oeuvre(5)

Aux archives de l'État on conserve les comptes de cette reconstruction de l'église, comptes détaillés, comptes de tout genre: depuis la note de l'entrepreneur de la maçonnerie jusqu'au petit billet réclamant 8 pat. - 4 fis pour tenir les chandelier devant l'image de la vierge de miraque.

Chaque fournisseur a son feuillet spécial, sur lequel on annote soigneusement les acomptes qu'il reçoit. A regarder ces notes multiples et ces divers payements, qui s'échelonnent quelquefois sur un espace de dix ans et plus, on voit de près les difficultés que le curé Manigart eut à surmonter dans cette réédification et comment il ne put donner parfois que des acomptes minimes.

L'église fut reconstruite dans le style néo‑grec, le seul à la mode au XVIIe siècle; le choeur de l'église était flanqué de deux chapelles latérales.

En lisant les documents paroissiaux, on se rend compte que les offices ont continué à Saint-Remy pendant toute la durée des travaux. Peut-être a-t-on bati le choeur et les deux chapelles en dehors de l'ancienne église - qui était trop petite - pour s'occuper ensuite du vaisseau de l'église. Le 18 avril 1645, « marché a été fait » pour achever les chapelles et le grand pignon du choeur. « Henri le masson (6) achevera la chapelle et ouvrage commence du cost de sainct Jacque ainsi que la chappelle et ouvrage fait de l'autre costé et fera de plus les deux pignons aux deux chappelles et le grand pignon du costé du coeur, tous trois de deux bricques espes et aussi haults et si larges qu'ils seront ncessairs d'estre faicts. » Il recevra « trois cents et ciucquante florins brabans (une fois bien entendu). » Tout est compris dans ce prix-là, même la bière pour les ouvriers; on devra pourtant fournir à l'entrepreneur « les blanches pierres taillues ainsi que l'on les vodra avoir. »

Le monument était surmonté d'un frontispice, composé d'énormes pierres: il avait fallu dix chevaux pour amener chacun de ces gros blocs de pierre. Ce détail nous est fourni par un acte public, dans lequel le curé Manigart a inscrit le nom de tous les bienfaiteurs (7)

Vers 1550, les gros travaux touchent à leur fin: en juin 1550, on renseigne « un premier versement de 150 fl. bb. sur les bois à livrer pour le coeur et comble de la dicte église de S. Remy. »

En 1551, on achève la tour: le 6 janvier 1651 on conclut un accord « pour faire et mettre et dresser le comble de la tour de S. Remy selon portraict lui donné par M. Léonard, jusque à mettre les ardoises... et mettre la croix. » Le tout fut fini la même année, car la note porte la mention: « tout payé ce 5e de janvier. 1652. » On employa « quarante milliers de petites ardoyses, reçeu en aumosme » des habitants de Revin et Fumay.

Entretemps - le 19 octobre 1647- le curé avait déj conclu un accord avec Gilles de Froid mont : celui-ci s'engageaà scuipterle grand autel « à l'image N. Dame avec huict colonnes flamboyantes ou tortues. (I)

   « Contrat et marché >, fut aussi conclu avec M. Leonard Froidmont (2) «pour la « table d'autel », l'assemblement de l'ouvrage inférieur, marche-pied d'autel de la ditte table cet artiste exécuta aussi (3) les Anges des deux autels petits des deux chapelles, l'ouvrage du portail de bois de l'église, les balustres des communians devant le grand autel. - Les payements s'échelonnent de 1651 à 663. Ce Léonard Froidrnont était mort dans l'intervalle et d'autres avaient été chargés par les héritiers de Froidmont d'achever son ouvrage « selon le dessin faict par le dit Mre Léonard. a Mais en 1663, faicts meilleurs calculs, le curé constate « les héritiers avoir plus reçu que le marché, scavoir soixante florins bbants et sept patars et demyt »

   Voici un autre incident pittoresque : (1) au fronton de l'église furent gravées les armes de l'abbé de Saint‑Jacques, comme si celui‑ci avait été le grand bienfaiteur! Les paroissiens en furent vivement émus, car l'abbé n'avait donné qu'une somme relativement restreinte. Pour calmer les justes réclamations, on grava à l'intérieur de l'église deux inscriptions, rappelant l'intervention du peuple dans cette reconstruction; le curé, en 1656, dira fièrement à l'archidiacre que de pieuses aumônes lui ont permis de rebâtir toute l'église a ecclesia a fundamentis oedifacata est tempore hujus pastoris ex piis eleemosynis. » (12)

L'église fut consacrée par l'évêque suffragant le 22 décembre 1659. Cependant « la Feste de la Dédicace a esté remise au Dimenche de la closse Pasque le mesme jour, que l'on célébroit la Feste de la Dédicace de l'ancienne Eglise. » (13)

L'évêque avait consacré également les quatres autels de l'église:

-       le Grand Autel, dédié à N. Dame, la Mère de Dieu, Consolatrice des Affligés;

-       l'autel voisin de Grand Autel, dédié à tous les Saints;

-       l'autel faisant la croisate au costé de l'Evangile, dédié à la SS. Trinité;

-       l'autel à l'opposite du Costé de l'Epistre, dédié à Saincte Anne, Mère de la Glorieuse Vierge Marie.

La statue miraculeuse de Notre-Dame, Consolatrice des Affligés, surmontait le maître-autel, qui lui avait été dédié. Le célèbre Walthère Damery (1610-1678) fut chargé de peindre le grand tableau derrière cet autel, représentant Jésus-Christ portant la croix: dans la partie supérieure de tableau on voyait Dieu le Père avec des chérubins. Le 20 mai 1662, le peintre déclarait « après avoir mis en place (14) le tableau d'autel et celuy d'enhault où est peint Dieu le Père, selon qu'il ma esté ordonné et selon le marché faict, jaij receu de monsieur le Rd Pasteur de Sainct Remy trois cents fl. bbant, quy est l'achevement de douze cent francs receus à plusieurs fois, dont je me tiens contente. »

En 1662, Laurent Damery s'engagea à « dorer le grand autel.., tout entièrement avec les figures... moyennant 500 fl. bb... ce qu'il a promis de faire au plusto et au jugement de son frère. » - Payé en 1663, il reçut comme gratification: « un souverain d'or de plus, pour avoir doré davantage que je ne devoit faire. »

*

L'église ne fut pas seulement reconstruite, elle put aussi s'enrichir ou arriver à une certaine aisance. En 1645, il n'y avait pas de lampe du sanctuaire ou du moins elle ne brûlait pas nuit et jour devant le Saint Sacrement, faute de ressources: propter paupertatem Ecclesiae.

Mais dès 1656, l'église semble mieux dotée: une pieuse demoiselle venait de léguer une fondation de 5 florins brabants pour qu'il y eût une lumière perpétuelle devant le Saint Sacrement; d'autre part, le sacristain reçoit une augmentation; l'église possède 3 lampes en argent, 5 calices (15) et bon nombre d'ornements convenables. Et le curé de son côté se dit content de son presbytère et de son petit jardin (16).

Cette aisance ne fait que s'accroître avec le nombre de pèlerins qu'y amène le culte de Notre‑Dame. En 1685, le curé Lamb. Fromont de Cersfontaine vante encore l'église et ses annexes, qui n'ont besoin d'aucune réparation, surtout la sacristie qui est commode et facile et donne pleine sécurité. Ce dernier détail est important, car l'église « habet insignem supellectilem » et le trésor s'est enrichi considérablement. En 1725, on énumère les ornements sacrés; et c'est une liste respectable:

Ornements complets, avec dalmatique et tunicelle : 2 rouges, 4 blancs, 2 noirs, 1 violet et vert;

chasubles (sans dalmatiques) 9 blanches, 3 rouges, 4 vertes, 3 violettes, 3 noires;

21 aubes, 22 corporaux, 12 draps d'autel, 27 manuterges, 7 lampes en argent et 8 en cuivre.

Ce n'est plus l'église « destituée d'ornements » dont parle Manigart. Dans la tour se trouvent cinq cloches; jadis il n'y en avait que trois.

Le curé Corn. Denijs, nommé en 1704, se fait aider depuis 1719 par un vicaire pour entendre les confessions et pour faire les prônes du dimanche: le vicaire est à sa charge.

Le même curé a rebâti le presbytère de ses propres deniers, car le curé Manigart l'avait seulement restauré et déjà en 1685 le curé Lamb. Fromont avait du débourser plus de cent « imperiales » pour le remettre en état (17). L'église à cette époque était « très propre et très bien ornée » et la célèbre image de Notre-Dame de Consolation continuait à y attirer foule de Liégeois.

La Révolution française vint détruire l'église et supprimer l'antique paroisse Saint‑Remy. L'église servit pendant quelque temps de lieu de réunion aux habitants des rues voisines. Elle resta cependant ouverte au culte jusqu'au moment, où l'on exigea des prêtres, en 1797, le serment de haine à la royauté. Le Rd Denis (18), curé de Saint‑Remy, refusa de prêter ce serment contraire à sa conscience, Il fut poursuivi et condamné à la déportation. Sa mise en liberté n'eut lieu que le 24 janvier 1799: encore le signala‑t‑on deux ans plus tard comme « perturbateur et réfractaire ».

L'église fut mise sous séquestre le 4 noyembre 1797: heureusement on avait pu expédier à l'étranger deux caisses, contenant la grande partie de l'argenterie et des objets précieux. L'église, le presbytère et le cimetière furent vendus le 13 octobre 1798: l'acheteur s'empressa de démolir le sanctuaire afin de pouvoir solder le prix d'achat. Encore, faute de payement, fut‑il déclaré déchu de son acquisition.

Jusqu'en 1844, l'emplacement de l'église Saint-Remy resta à l'état de jardin: un mur clôturait le terrain. Lorsque le nouveau propriétaire éleva au coin de la rue du Vertbois la construction actuelle (hôtel de M. Wethnall) (19), il céda une très large partie du terrain pour agrandir la place (20).

Quant au mobilier de l'église, une partie en avait été dérobée et le reste fut vendu en 1798 pour 522 francs.

D'ailleurs Defrance avait déjà fait expédier pour Paris le grand tableau de W. Damery.

Heureusement la statue si vénérée de Notre‑Dame échappa aux mains sacrilèges. Grâce au curé Denis, l'image miraculeuse fut sauvée et déposée secrètement chez M. André Baral, ancien moine de l'abbaye, devenu chanoine de la nouvelle collégiale (21). Dès que la paix religieuse fut rétablie, l'église Saint-Jacques, devenue paroissiale, reçut la pieuse image.

 

La dévotion à Notre‑Dame de Saint‑Remy.

 

Le Curé de Saint‑Remy: Jean‑Henri Manigart.

On ne peut faire l'histoire de Notre‑Dame de Saint‑Remy sans parler de son premier historien et du grand promoteur de son culte Jean‑Henri Manigart (22), curé de Saint‑Remy‑en‑île. Protonotaire apostolique et licencié en sainte théologie, il est apprécié dans le monde savant à cause de son ouvrage considérable Praxis Pastoralis, qui de son vivant même fut plusieurs fois édité. Il devint chanoine de la collégiale de Saint‑Bathélerny et examinateur synodal. Nommé curé de Saint‑Rerny en 1641, il s'est occupé de son église et de sa paroisse pendant 41 ans, avec un zèle et un dévouement au‑dessus de tout éloge: la reconstruction de l'église en fournit maint détail. Il est mort le 25 septembre 1682, âgé de 67 ans, laissant ses livres à la bibliothèque du Séminaire et tous ses biens à différentes institutions charitables.

Le curé Manigart était donc un homme instruit, comme ses livres en témoignent; un homme judicieux, doué d'un bon sens réel: ne fallait‑il pas pareil chef à la paroisse de Saint‑Remy, pour que les merveilles, auxquelles il a assisté et qu'il noua raconte, pussent être crues en toute confiance? Il édita dès 1647 un opuscule Miracles ou Faveurs grandes, ainsi que diverses Chansons Spirituelles en faveur des amateurs de Notre‑Dame de consolation; enfin en 1657 un ouvrage Diva Leodiensis Consolatrix Afflictorum. L'église Saint‑Jacques possède son important manuscrit, dans lequel, outre la copie des opuscules cités, il rapporte d'autres « faveurs et bénéfices, faicts par l'intercession de N. Dame de Consolation..., qui lui ont esté attestés par les Personnes qui les ont receu et obtenu. »

Le curé Manigart recherchera toujours les témoignages authentiques, il ne rapportera le fait merveilleux que s'il est entouré de toutes les garanties nécessaires, et pourtant ses récits respirent une piété si tendre envers la Vierge, Consolatrice des affligés! Ce ne sont pas des dissertations doctes et arides, mais de petits récits, pleins de vie et émaillés de traits naïfs, tels que les malades guéris les ont racontés. Et lui‑même, serviteur dévoué de Marie, ajoutera à chaque fait une petite considération, souvent originale et pittoresque, mais toujours pleine d'une touchante piété.

C'est de préférence le manuscrit du curé Manigart que nous suivrons dans cet exposé.

 

Origines du culte à Notre‑Dame de Saint‑Remy.

Depuis quand existe la statue de Notre‑Dame? La réponse n'est pas très précise les renseignements quant à la date exacte ou quant au nom de l'artiste,  qui a sculpté cette belle Vierge, manquent complètement. Le curé Manigart n'affirme rien, mais dans son livre de 1657 il rapporte - avec complaisance - la tradition antique, disant que « depuis plusieurs siècles la Vierge Marie était déjà honorée en ce sanctuaire de S. Remy. » Veut-il insinuer par là que la statue miraculeuse soit aussi ancienne?

Les caractères artistiques de la statue peuvent donc seuls nous fournir une date approximative. Or, d'après les signes qui caractérisent l'art de ce groupe sculpté, les spécialistes l'attribuent généralement à la fin du XVe siècle.

C'est d'ailleurs au XVe et au XVIe siècle que la dévotion aux douleurs de Marie, à Notre‑Dame de Compassion, prit une extension considérable dans nos contrées: même les petites églises de village possédaient un groupe pareil, souvent très expressif - que la statue fût rudimentaire ou finement sculptée.

Notre‑Dame de Saint‑Remy est une Pieta, taillée en pierre assez friable. La Vierge assise tient le corps inanimé de son Fils sur ses genoux. Dans la figure du Christ on remarque des fautes de proportion, notamment dans les extrémités (23), mais la composition de l'ensemble n'est pas sans grandeur.

Regardez la Vierge: de sa main gauche elle soutient la tête de son Fils qu'elle considère d'un regard attendri. Lisez dans ses yeux l'expression d'une profonde affliction et en même temps admirez la résignation profonde, calme, sereine, que manifeste cette Mère toute en larmes. - La Vierge de Saint-Remy est vraiment belle (24).

N'oublions pas de signaler que « ce groupe est encore couvert de la peinture primitive, traitée avec délicatesse et harmonie; le brocart de la robe de la Vierge notamment est exécuté avec une grande perfection. » (HELBIG).

Quant à l'origine du culte de Notre‑Dame de Saint Remy, nous trouvons comme première mention un testament (25) du « dousiem jour du mois de juillet » 1624; Marie Mahoun y demande que son corps soit enterré à Saint‑Remy « à l'opposite de notre dame de pitié. » Et par le même testament elle « laisse à la glorieuse Vierge Marie en l'église Sainct Remy un chapellet de coral tel qu'au jour de son trespas serat trouvé. » (Il s'agit d'un chapelet à mettre en ex‑voto devant la Vierge, comme le XVIIe siècle en ajoutera un grand nombre).

Vers 1635, julienne de Roclenge fonde une rente de 7 1/2. bb. sur la maison de l'Écu d'or, près du pont des Arches (26), à charge de chanter chaque mois une messe en l'honneur de la Sainte Vierge.

Dans son testament du 27 janvier 1642, Elisabeth Rambotte (27), voulant que son corps soit enseveli en la chapelle de nostre Damme, lègue plusieurs rentes à la fabrique de la ditte église Sainct Remy rescommandant prinsipalement la chapelle de nostre Damme; elle lui lègue aussi tous ses biens meubles: objets en argent, bagues, linge, plats d'étain, tranchoirs, chandeliers, etc. Comme legs spécial à la Vierge, elle prescrit: quant à la chaîne d'argent, de laquelle la ditte testatesse at asseuré en sa conscience luy appartenir et lui avoir esté donnée par sa soeure pacquette, elle la laisse et legate à l'imaige de la Vierge, estante en la ditte église S. Remy, avecque quattre chapellet de coral, l'un desquels lui est desia appartenant comme ayant esté donné par la ditte pacquette sa soeur entre les mains du pasteur Hardy (28) à effect de servir à l'imaige de la ditte Vierge avecque tous les ornements de l'autel de la ditte Vierge, comme cottes, gordinnes d'armoisin...

 

Épanouissement de la dévotion.

Dès 1643, la dévotion s'accrut d'une manière extraordinaire et par des faits étonnants la Mère de Consolation récompensa la confiance qu'on mettait en elle. « Plusieurs personnes pieuses y ont trouvé guérison en leurs blessures et maladies comme aussi consolation en leurs misères et allègement en leurs maux... Le bruit de ces merveilles courut aussi tost par le pays et convia tous les pauvres misérables à y accourir pour trouver remède à leurs maux »: aussi on vint en pèlerinage à la Vierge de Saint‑Remy des villes, même éloignées: Huy, Tongres, Maestricht, Dinant, Bruxelles. En 1645 se produisirent deux guérisons, que l'autorité ecclésiastique et une commission de médecins et de théologiens examinèrent et qualifièrent de miraculeuses: nous en donnerons le résumé à la fin de cette brochure ainsi que le récit de quelques autres faveurs.

Depuis cette date, Saint‑Remy devint un lieu de pèlerinage très fréquenté: la seule reconstruction de l'église en est le témoignage incontestable. Certains détails en feront apprécier l'importance quoique l'église fût agrandie, elle ne pouvait pas contenir cependant tous les fidèles, qui venaient prier devant la statue miraculeuse; les foules s'y succédaient du matin au soir, surtout les dimanches et les jours de fête. Avant l'aurore même, on venait attendre devant la porte du sanctuaire aussi à certains jours huit confesseurs auraient à peine suffi pour entendre les confessions de toutes ces personnes, qui voulaient s'approcher de la Sainte Table.

Chaque jour on y célébrait des messes depuis l'aurore jusqu'à midi. Le soir on chantait les Litanies de la Sainte Vierge et de nouveau les dévots serviteurs de Notre‑Dame de Saint.Remy y accouraient en foule. A leur usage, le curé Manigart édita en 1657 la seconde partie de son livre les Chants spirituels avec annotation grégorienne: c'est le manuel des pèlerins.

En 1645 le curé Manigart commanda au peintre Horion« une effigie de Nostre Dame douloureuse» (29), qu'on portait aux malades incapables de venir à l'église; l'évêque suffragant vint la bénir.

Vers la même époque (30), pour représenter les « stationes septem dolorum B. M. V. » il fixait au mur du monastère de Saint-Jacques, en face de Saint-Remy, sept croix en bois. - Plus tard, plus d'un malade fera célébrer « sept messes à l'honneur des douleurs de N. Dame. » (31)

Combien le culte de Notre‑Dame Consolatrice des Affligés fut populaire, se déduit aisément du fait qu'on trouve actuellement encore de petites statuettes en terre cuite du XVle et du XVIle siècle, représentant ce groupe. Gilles Fiacre, qui a sculpté bon nombre de statues pour l'église Saint‑Remy, a fait également en terre cuite une reproduction de la statue miraculeuse (32) on y lit l'inscription:

N. DAME - DE - CONSOLATION - A - S-REMY-EN-ILE.

D'ailleurs les princes‑évêques eux‑mêmes et les nobles de la principauté donnèrent aux Liégeois l'exemple de la dévotion à Notre‑Dame de Saint-Remy.

Le prince Ferdinand de Bavière (1612-1650), de sa résidence de Bonn, envoya plus d'une fois des personnes pieuses pour venir prier en son nom la Consolatrice des Affligés. Quand il était à Liège, on le vit avec toute sa cour prier parfois une heure entière devant l'image miraculeuse (33)

En 1644, « il commanda de faire une grosse chandelle de grand prix pour estre posée devant l'image Douloureuse de Notre Dame. » Le 31 juin, le vicaire général Jean de Chokier bénit le cierge au nom de Son Altesse et célébra la messe, « laquelle se chanta en Musique par les principaux Musiciens de la Ville, avec une grande affluence de peuple, ne pouvant assez admirer la grandeur et la grosseur de ceste chandelle comme aussi la dévotion de sadite alteze Serenissime ».

Quelque temps après le baron de Berlo, seigneur de Chocquier (Choquier), fit faire (34) un second cierge semblable: « une grosse chandelle à l'imitation de celle de S. A. S. ». Pour remercier la Vierge de Saint‑Remy d'avoir sauvé « madame sa femme.., tombée avec son cheval sus dessoubs dans une gouffre, » il fit vendre le cheval: « on a faict faire la chandelle, qui fut placée au costé de l'image de Nostre Dame, et le rest du prix a esté applicqué à la réparation de la dicte église de Sainct Remy. »

Le prince-évêque Maximilien-Henri de Bavière (1650-1688), neveu de Ferdinand de Bavière, avait pour la Vierge de Saint-Remy la même dévotion que son prédécesseur. Le lendemain de son sacre et de sa première messe pontificale à la Cathédrale de Saint-Lambert, il vint dire la messe devant l'image miraculeuse et distribua la sainte communion aux nobles, aux courtisans et à une grande multitude de peuple. - Le même prince contribua par sa libéralité à orner l'église: aussi Manigart lui dédie son ouvrage: « B. M. V. Consolatricis Afflictorum Maximo Cultori. »

Un autre évêque (35) donna une preuve de piété semblable à Notre‑Dame de Saint‑Remy. En exécution d’un voeu, S. G. Mgr Eugene‑Albert d'Alemont, évêque de Ruremonde, vint célébrer sa première messe pontificale au grand autel que surmontait la statue miraculeuse. C'était le 8 septembre 1659, fête de la Nativité de la Vierge. La solennité s'accomplit en grande pompe, au milieu d'une nombreuse assistance.

Quant à la foule ordinaire des pèlerins, il est plus difficile de donner de grandes précisions; mais, même uniquement d'après le récit des faveurs que Manigart signale dans son manuscrit, on voit très bien que la foule est accourue de tous les côtés de la ville et du diocèse. Ainsi parmi ceux qui viennent à Saint‑Remy remercier la Vierge des bienfaits obtenus, on peut citer comme au hasard: « Jeanne del Hert de la paroisse de S. Remade‑au‑pont; Henri Thiry de la paroisse de Ste Catherine; Anne Ferier, demeurante proche de la porte de St Léonard; Dame Marie, Religieuse au Monastère de Vivegnis et fille de Monsieur I'Eschevin Haling; Adrian Sauveur, nepveu de Monsieur Martin Sauveur, Pasteur de St Jean‑Baptiste; Jeanne, fille d'Erard Bioken de la Paroisse de St Magdalaine; Jeanne d'elle Fosse; Anne Rayr, fille d'honeste homme Maximilien Rayr, charpentier de la paroisse St Verone; honeste femme Marie Vincent de la paroisse de St Servaix; la femme Jean de Pont de la paroisse St Thomas; Jean Fabri de la paroisse St Martin; honeste Damoiselle, la soeur de Monsieur l'Advocat de Wé; Margarite, espouse a Colas Raquet de la paroisse de St Phoillien; Elizabeth le febve, bourgeoise de Liège; Jacqueline du Faubourg Saincte Vezone; Jean Goesvin demeurant en la paroisse de Notre Dame au fond (sic); un bourgeois de la paroisse de Saincte Aldegonde, etc., etc. »

En dehors de la ville: « Damoiselle Eve Maria, fille du Comte d'Esneux; femme Foillienne de Vaes, natif de Cimay, Damoiselle Margaritte demeurante à Malmedy, Monsieur le Capitaine de Mani au service de Sa Majesté Catholique, Révérend Pasteur d'un village proche de Salms, nommé Reth, au diocèse de Cologne, » et d'autres encore.

Et ils reviennent tous remercier Notre-Dame: les uns font dire une messe - Monsieur l'Eschevin de Liège fait célébrer une belle messe en musique, les pauvres se contenteront d'une messe basse - d'autres font une neuvaine de prières en action de grâces, presque tous laissent un cadeau à Notre-Dame, comme preuve tangible de leur reconnaissance. Les infirmes guéris déposent aux pieds de la statue miraculeuse leurs potences » « leurs ferramens »; la comtesse cl'Esneux enverra une couronne d'argent, d'autres une pièce d'or, une chaîne d'argent doré; des religieuses apporteront « un présent de fleurs au vif » « une couronne de cantille »; l'ex-capitaine M. Mogotteau « fait mettre dans l'église un tableau représentant le naufrage » duquel la Vierge l'a sauvé.

Viennent ensuite des fondations en l'honneur de Notre-Dame:

en octobre 1644, damoiselle Elisabeth van Tholmaer, relicte de feu le sr Alart Libon « légate audit curé de Saint‑Remy pour chanter une grâce journalière a son intention à l'autel de N. Dame de Pitié miraculeuse en la ditte église »;

en 1676, Berthe Hengen légua six fl. bb. sur une maison, située « devant les soeurs grises » (rue des Clarisses), pour assister au luminaire de nostre Dame;

d'autres legs sont faits à l'église « pour y tant plus honorer nostre dame dans son image miraculeuse. »

Ajoutez à tout cela la longue série des cadeaux ordinaires: deux cierges, « une chandelle à mettre tous les dimenches », une jambe d'argent, des chapelets, des petits coeurs en argent; en 1685, il y a tant de petites choses « devant l'image de nostre Dame… coeurs d'argent avec autres petites minutes comme chapelets et coraux » que le curé de l'église doit se contenter d'une énumération globale. Pourtant en 1726, l'archidiacre spécifiera: il a compté trente‑six coeurs en argent et une petite croix en or, outre les objets de valeur que le trésor de l'église possède.

Dès la fin du XVIIe siècle, l'argenterie de Saint-Remy semble considérable aux curés de cette petite paroisse, qui auparavant n'avait guère connu l'aisance. Le tout fut « répertorisé et estimé dans la maison pastorale par le sieur Jean de Lamine orphève, le 6 octobre 1685. » (36)

Outre les calices, remonstrance, encensoir, signalons plus spécialement:

une petite couronne avec des blanches et rouges pierres qu'on met sur la teste de nostre Dame; (37);

cinque lampes d'argent, (allumées devant la statue miraculeuse);

huict pairs de chandeliers d'argent tant grands que petits, scavoir 4 pairs de petits, qui font huict pairs ensemble;

une grande couronne d'argent avec six coeurs d'argent; (37)

une grande couronne de cuivre dort; (37)

Il y avait encore à l'église une statue de l'Enfant jésus et un groupe de Sainte Anne, la Vierge et son Enfant. A Saint‑Remy, où la Vierge est en si grande vénération, ces statues auront aussi leur couronne:

une petite coronne d'argent sur la teste de petit Jesus dans l'église; (37)

trois coronnes d'argent sur les testes de N. Dame, de Ste Anne et petit Jesus dans l'Église.

Le trésor s'accrut encore au XVIIIe siècle. On signale entre autres deux demi‑colonnes en argent, qui soutiennent la grande couronne en argent au dessus de l'image miraculeuse de Notre‑Dame (38). Vers la même époque, le sculpteur jean Delcourt venait d'achever deux anges, destinés à tenir le voile ou la couronne de la Vierge. Sur les images, éditées au début du XlXe siècle, on a représenté ces anges, tenant la couronne.

En 1714, le fondation de joseph Hamal mérite notre attention: il légua une rente de 30 fl. bb. « pour son anniversaire et deux messes basses et pour jouer d'orgues tous les samedis et jours de festes de la vierge lorsqu'il n'y aura pas de neuvaine. »

Au XVIlle siècle, la procession du Très Saint Sacrement à la paroisse Saint‑Remy fut aussi une manifestation de piété envers la Vierge miraculeuse. Par plusieurs chars de triomphe on y représenta (39) « en premier lieu la vie du Glorieux Sainct Remy Patron de cette même église, et en second lieu celle de la tant incomparable Mère de Dieu Consolatrice des Affligés, honnorée par un concours journalier du dévot Peuple Liégeois & tant renommée par les miracles qu'elle a opérés & qu'elle opere encore journalièrement en faveur de ceux & celles qui se confians entièrement en elle viennent implorer son assistance dans cette ditte Église. »

« On prie tous les dévots de cette aimable Vierge Miraculeuse d'y assister avec flambeaux. » Cette procession sortit hors des limites de la paroisse jusqu'à «Gerarderie, Souverain Pont, large rue, surmeuse. »

Dans les Délices du Pays de Liege ", vers 1738, on constate que l'église Saint‑Remy est « fort fréquentée par raport à une Image de la Vierge, surnommée Notre Dame Consolatrice des Affligés, fameuse par un grand nombre de Miracles, qui y atirent quantité de personnes pieuses. Tout le peuple a cette Image en grande vénération ».

 

Les Manteaux de la Vierge.

Au XVlle et au XVIIIe siècle, la mode d'habiller les statues des saints jouissait en nos contrées d'une vogue universelle. Plus d'une fois on mutila d'exquises statues de la Vierge pour les affubler de robes et d'ornements dans le goût de l'époque.

Notre-Dame de Saint-Remy a été préservée des outrages et des mutilations de ces pieux iconoclastes, mais la statue était ornée quand même selon la mode du temps. Quoique notre Vierge fût une statue de Notre-Dame de Douleurs, on l'habillait d'un manteau de couleur joyeuse ou d'un manteau de deuil selon les fêtes ou les temps liturgiques; à cette mère en larmes on mettait constamment une couronne d'argent, rehaussée de pierreries. - Dans le trésor de Saint-Jacques on conserve encore quelques couronnes en argent doré, imitant la couronne d'épines: cette richesse servait à « orner » la tête du divin Crucifié, reposant entre les bras de sa mère.

Lorsque en 1641 J. H. Manigart entra en fonctions comme curé de Saint‑Remy, il cite dans son inventaire des objets de l'église:

Item une cotte ou robe de Nostre Dame, le devant bleu avec des estoiles d'or.

Item un devant de Nostre Dame de couleur incarnate.

Item un autre vieux devant de rouge velour.

Item encore quattre autres cottes ou robettes de diverses couleurs.

A la date du 17 décembre 1655, le curé Manigart paya la note suivante: faict un manlaux pour Nostre Dame de satin viole, pour fason et soie: 1 fl. 15.

En 1774, l'inventaire ne mentionne pas moins de 11 manteaux: des rouges, des blancs, des bleus, des verts, des dorés, avec ou sans fleurs, avec fleurs blanches, fleurs dorées ou fleurs de diverses couleurs!

Quelques vieux paroissiens se rappellent qu'au XIXe siècle encore on affublait la statue de Notre-Dame - aux grandes occasions - d'un manteau pareil. Heureusement le bon goût a repris ses droits et la piété actuelle des fidèles préfère l'image de la Vierge, telle qu'elle est: sa polychromie ancienne est d'ailleurs d'une réelle beauté.

 

La Confrérie.

Dès l'année 1645, on trouve dans les registres paroissiaux la mention d'une « confrérie de la Visitation de la Ste Vierge. » A Saint‑Servais et à Saint-Séverin à Liège la confrérie porte le même nom; à Saint‑Remy on s'explique plus difficilement que ce nom ait été donné â une confrérie, honorant Notre-Dame des Douleurs.

Les pièces d'un procès de 1763 entre le curé Demeuse et les maîtres de confréries - fournissent quelques renseignements.

A l'époque de sa fondation, la Confrérie de la Visitation ne s'occupait pas de la Vierge, Consolatrice des Affligés. C'était une de ces pieuses corporations, telles que le moyen‑âge les concevait. Au moins â l'origine elle n'était qu'une simple société récréative, placée sous le patronage de Notre‑Dame, confraternité dont la fête principale était la Visitation de la Vierge; les membres en corps devaient assister à certains offices.

Ces confrères de la Visitation n'étaient - semble-t-il - que de braves bourgeois qui s'amusaient à tirer l'oiseau (le « pabiè » ou perroquet, servant de cible). La confraternité avait été érigée anciennement « aux Carmes en isle »; elle s'appelait alors la « compagnie des archers de Notre Dame des Carmes en isle» -

Tout près des Carmes - probablement dans un terrain vague d'une île de la Meuse, vers la place actuelle du 20 Août - était l'endroit où on tirait l'oiseau.

La date de l'érection de cette compagnie nous est inconnue: en 1628, on renouvela les « règles » de l'association; en 1629, les points du règlement pour tirer l'oiseau furent « arrestés par le Corps de la Confrérie. »

Pourquoi la confrérie quitta‑t‑elle les Carmes? Depuis quand s'appelle‑t‑elle Confrérie de la Visitation?

Voici en substance quelques faits dont nous sommes certains. C'est en 1643 que la Confrérie de la Visitation a été érigée à Saint‑Remy: le titre complet est énoncé comme suit: « confrairie de Notre-Dame de Sainct Remy, sous le titre de la Visitation de la Vierge. » La fête du 2 juillet restait la fête principale de la Confrérie. L'extension soudaine que prit le culte de la Consolatrice des Affligés vers 1643 paraît bien avoir attiré la Confrérie dans cette église.

Il ne semble pas - au XVIIIe siècle du moins - qu'on tirait encore l'oiseau: la corporation de jadis n'était plus qu'une simple confrérie. Encore gardait-on précieusement les coutumes et vestiges du passé.

Ainsi on élisait toujours « Roy et maîtres au nombre de sept »; il y avait en outre greffier, assistants, confrères, consoeurs et varlet ou serviteur. La pièce capitale de leur trésor était un « pabiet ou oiseau d'argent doré', entouré de dix sept médailles d'argent avec chaisne, dont le Roy entre deux maitres le porte à son col, à la feste de la visitation. »

Parce qu'ils honoraient Notre‑Dame de Saint‑Remy sous le titre de la Visitation, les confrères se faisaient accompagner du varlet portant un vieux tableau où était peinte la Visitation de la Vierge: c'est ainsi qu'ils assistaient en corps à la procession paroissiale.

En 1702, ils se mirent en frais et payèrent « cincquante et un florins bb. » pour un groupe sculpté, représentant la Visitation. Le 29 juillet 1702, Monseigneur de Liboy, évêque suffragant de Liège, vint bénir solennellement la statue. Cette image avait sa place au choeur de l'église près du grand autel que surmontait le groupe de Notre‑Dame Consolatrice des Affligés. En 1745, ils commandèrent « un throne de bois doré ».

La Confrérie avait plusieurs objets en argent, reçus comme cadeaux ou achetés avec la recette des collectes « tant dans l'église que dehors » :

huict platinnes d'argent pour les maitres et assistants qui accompagnent le Roy;

trois platines de métal dont une représente la Vierge de St Remy et les deux autres la Visitation, qui serve à faire des images qu'on distribue aux confreres et consoeurs à leur enrollement à la feste;

une platine d'argent... y inscrit allentour d'icelle: « par les maitres et confreres de la Confrairie de N. D. de S. Remy en la Cité de Liège, 1646»;

deux petites toilles d'argent que l'on pose sur la teste de la visitation; un coeur d'argent qu'on met entre ses mains: petits ornements dans le goût de l'époque pour « embellir » le groupe sculpté;

un baton entouré d'argent qui représente la visitation: le varlet portait ce bâton pour précéder les maîtres et confrères allant à l'offrande à la messe du mois; de même il était obligé de le porter « pour aller devant, à la procession ».

Pour montrer leur zèle envers Notre‑Dame, les maîtres et confrères attestent avec complaisance « qu'ils vont aux processions et festes des confrairies d'autres paroisses avec leur pabiet ou oiseau d'argent doré et platinnes d'argent pour attirer le peuple à l'église de St Remy ». Aussi ce n'est pas sans fierté que la Confrérie de la Visitation cite parmi ses membres « des gens de toutes paroisses et faubourgs de Liege... chanoines, prestres, couvents, bourguemaîtres, commissairs, marchands et autres braves personnes ».

La fête de la Visitation du 2 juillet était la grande solennité. Le Roy mettait ses plus beaux atours: chaîne, médailles, pabiet; les maîtres leurs « platines d'argent ». Lorsque le Pape Benoît XIV accorda, en 1745, une indulgence plénière à tous ceux qui visiteraient l'église de Saint‑Remy et y prieraient aux intentions du Souverain Pontife, cette fête prit une importance plus considérable encore.

A l'occasion de cette fête se produisirent certaines difficultés, premières manifestations de cette opposition qui allait amener la suppression de la Confrérie. D'abord de petites querelles quant au lieu de réunion, la garde des objets de la Confrérie; l'hostilité grandit: le curé de la paroisse refuse « sa belle remonstrance » pour la neuvaine solennelle; une autre année, il ne veut pas prêter l'argenterie de l'église: on a recours à St Jacques et « ayant eu vent qu'on aurait l'argenterie de S. Jacques, il y posat la sienne ». Enfin, en 1763, les maîtres de la Confrérie intentent un procès à un certain Dodémont pour revendiquer la propriété de quatre lauriers, dont on ornait l'autel de la Vierge pendant la neuvaine. Le procès de ses maîtres de Confrérie irrite très fort le curé, qui leur défend désormais de quêter à l'église.

C'est ainsi que les maîtres et confrères exposèrent la situation à Monseigneur le vice‑prévôt.

L'opposition du curé Demeuse à la Confrérie de la Visitation est certaine: cette Confrérie méconnaissait trop l'autorité du curé; de plus - quoi qu'en disent les confrères - l'opposition du curé venait aussi d'un motif de piété, de zèle pour le culte de Notre-Dame: l'ancienne Confrérie, avec ses symboles archaïques d'une compagnie d'archers, donnait trop d'importance aux cérémonies purement extérieures, négligeait un peu le culte de Notre-Dame de Saint-Remy depuis qu'on avait la nouvelle statue de la Visitation. Le curé en effet insistait sur ce point que « ce n'était pas l'image de la Visitation qui avail attire et attirait le peuple à St Remy », mais bien la statue miraculeuse de la Consolatrice des Affligés. Il voulait promouvoir davantage ce culte, en fondant une nouvelle confrérie, avec une autre fête principale: ainsi devaient tomber ces anciens usages, qui n'avaient rien de commun avec une pieuse confrérie.

En 1763, par l'intermédiaire du chanoine Gilard de Saint‑Martin, le curé avait envoyé une supplique à Rome pour ériger une nouvelle Confrérie de Notre-Dame, ayant l'Immaculée‑Conception comme fête principale.

Les confrères songèrent‑ils à s'en aller de Saint-Remy, à retourner aux Carmes? On pourrait le croire, car le vice‑prévôt leur avait répondu: « qu'il leur sera libre de s'en aller ailleurs avec leur Confrairie mais que ce ne serait pas faire honneur au curé ». Sentant de plus en plus que le curé finirait par l'emporter, les maîtres proposèrent de se soumettre complètement pourvu qu'on gardât à la Confrérie son « titre de la visitation ».

Les pièces du procès ne donnent pas plus de détails. Mais nous savons que le curé Demeuse réussit dans son projet, car la fête de l'immaculée‑Conception est devenue la fête principale de la Confrérie et continue à être célébrée comme telle, même de nos jours. Et les lettres du Pape Clément XIII, accordant une indulgence plénière à ceux qui visiteront l'église de Saint‑Remy â la fête de l'Immaculée‑Conception, sont datées du 9 août 1763.

Certains objets précieux de l'ancienne Confrérie de la Visitation sont encore gardés dans le trésor de Saint‑Jacques. La Confrérie actuelle est heureuse de posséder les « platinnes d'argent », la « platinne de métal avec l'image de Notre‑Dame de Saint‑Remy » et surtout le fameux « pabiet ». (40)

 

Confrérie de Notre‑Dame Consolatrice des Affligés.

En octobre 1763 fut publié à Liège un opuscule in-12, de 16 P. :

Sommaire des indulgences CONCÉDÉES A PERPETUITE PAR N. S. P. LE PAPE CLEMENT XIII, LE 9 D'AOÛT 1763, AUX CONFRERES ET AUX CONSOEURES DE LA CONFRÉRIE DE LA BÉNITE VIERGE MARIE, CONSOLATRICE DES AFFLIGES, INSTITUÉE ET ÉRIGÉE EN L'ÉGLISE PAROISSIALE DE S. REMY EN LA CITÉ DE LIEGE.

Outre ces indulgences, le petit volume contient encore les Règles à observer. Si tout nouveau règlement fait allusion aux abus du passé, il suffira de lire les premières lignes pour avoir un écho du conflit qui venait de se produire entre le curé et la confrérie de la Visitation.

Voici les nouvelles règles

1° Le Rd Pasteur de la dit te église sera toujours le Grand‑Maitre et surintendant de la Confrérie, de manière que rien ne se fera de tant soit peu important que de sa participation et consent.

2° Il y aura deux Maîtres de Confrérie des plus zélés qui seront choisis par ledit Révérend Pasteur et qui seront permanants, et on en fera chaque année deux autres.., au choix des Confrères & l'acceptation du Révérend Pasteur & Maitres permanants.

3° Un greffier ou Receveur tiendra un compte exact… et cela gratis.

4° Sans la permission du curé, on ne pourra ni aliéner ni transporter ce qui appartient à la Confrérie,

5° ni faire des frais extraordinaires.

6° Le Pasteur tranche tout différend: en cas d'opposition, le nom du contreventeur sera biffé de la Confrérie.

7° Pour enrollement, on devra donner deux escalins ou un florin brabant le moins; la cotisation annuelle sera de un florin brabant pour chaque Confrère et de quinze patars pour les Consoeures.

8° Un tronc à deux serrures gardera le produit des collectes.

9° II y aura un Serviteur, qui sera obligé de semoncer et avertir chaque Confreres et Consoeures le Samedi avant le premier Dimanche de chaque mois pour se trouver à une Messe qui se célébrera à onze heures, pour les vivans et trépassés de la Confrérie; ledit Serviteur sera aussi obligé de convoquer toutes les fois qu'il lui sera commandé par le Révérend Pasteur & aura un gage.

10° Si quelques Confrères et Consoeures restaient trois mois sans payer l'année échue, le Greffier les feras admoneter par le Serviteur d'y satisfaire; que s'il y avait deux années échues, il sera tracé du Catalogue.

11° Quand un Confrère ou une Consoeure viendra à mourir, la Confrérie fera célébrer une Messe pour le repos de l'âme du défunt et cela à ses frais, après que les exeques ou Messes de Droit auront été célébrées; et s'il est de la Paroisse, six Confrères porteront des flambeaux à son éterrement, & le jour de la Messe tous Confrères & Consoeures seront convoqués par le Serviteur de s'y trouver.

Ce règlement se termine par la recommandation suivante : « Les Associés, autant qu'ils pourront, devront assister aux Processions de la Paroisse & quand on portera le Viatique aux Malades, les Confrères porteront des flambeaux de la Confrérie, et les Consoeurs accompagneront le Très‑Saint Sacrement avec un Esprit d'humilité, de dévotion et d'adoration. »

En 1774, à la visite de l'archidiacre, on mentionne la Confrérie de la bienheureuse V. Marie et la messe qui est célébrée chaque mois pour les confrères.

La fête de la Compassion de la Ste Vierge a revêtu à cette époque une splendeur spéciale. Une fondation, qui rapporte annuellement 100 fl. bb., supporte tous les frais: on spécifie jusque dans les moindres détails l'emploi de cette somme.

La veille de la fête, il y a salut solennel.

A la grand'messe de la fête, on demande l'assistance d'un nombreux clergé: célébrant, diacre, sousdiacre; 4 prêtres en surplis, qui porteront des flambeaux à l'élévation; 2 autres prêtres pour « entonner. » Tous chanteront aussi les vêpres, et les complies à l'office du soir. On paye 3 musiciens et 2 choristes: pour qu'on ait de la bonne musique, on stipule qu'il est absolument requis qu'un des musiciens soit « magister musicae » d'une église de chanoines à Liège. Un des musiciens doit chanter la basse « bassam canere » pour le chant du Stabat Mater: il recevra un léger supplément!

Et dans l'énumération des emplois rétribués on n'oublie personne: prédicateur, organiste, sacristain, acolytes sont cités à tour de rôle; on accorde même une gratification au fossoyeur, qui pour cette grande solennité doit donner un coup de main au sonneur!

Il y aura en outre une distribution de pains: 70 pains, à 2 as le pain; et sept pauvres honnêtes recevront chacun 2 solidos.

*

Pour apprécier la faveur dont jouit te culte de Notre Dame de Saint-Remy à la fin du XVIIIe siècle, nous n'avons plus que cette indication du curé de la paroisse: « on emploie, dit-il, à l'ornementation de l'église toutes les offrandes faites devant l'image miraculeuse de la Vierge - offrandes qui sont maintenant bien minimes,.. nunc valde tenues.

Le culte de la Consolatrice des Affligés semble donc avoir diminué à cette époque. Mais alors approchent les mauvais jours de la Révolution française, où les chrétiens, persécutés dans leur foi, secouent la torpeur qui les paralyse: la persécution produit un renouveau de vie chrétienne. Avec confiance le peuple dévot de Saint‑Remy et des paroisses environnantes a recours à Celle qui est le Refuge et la Consolatrice des affligés et, s'ils voient leur église fermée au culte, ils ont du moins la consolation et le bonheur d'avoir soustrait aux mains sacrilèges la statue miraculeuse de Notre‑Dame.

 

 

Le Culte de Notre‑Dame au XIXe siècle.

 

Notre‑Dame de Saint‑Remy à l'église Saint‑Jacques.

Ce fut grande fête au quartier de l'île que ce 4 décembre 1803. Depuis deux ans la collégiale de Saint‑Jacques était devenue l'église paroissiale, mais voilà six ans que les paroissiens ne pouvaient plus prier devant l'image aimée de la Vierge miraculeuse. Ce jour‑là, le voeu, qui leur tenait tant à coeur, allait être réalisé: la statue de Notre‑Dame, Consolatrice des Affligés, rendue à la dévotion publique.

Le temps, il est vrai, ne favorisait pas cette translation solennelle. Et pourtant, lorsque vers trois heures de l'après‑dîner on commença la cérémonie, une foule énorme se pressait sur la place Saint‑Jacques pour escorter la statue miraculeuse, de la demeure du chanoine Baral à l'église Saint Jacques.

Enregistrons le fait suivant: « une chose frappa tous les assistants dont le nombre étoit immense; ce fut de voir cesser, au moment de la sortie de la procession, la pluie qui tomboit mêlée de neige et qui ne recommença à tomber comme auparavant, qu'après la rentrée. - Ce fait peut être attesté par un millier de témoins vivants. » (1807).

A Saint‑Jacques le groupe de Notre‑Dame des Douleurs fut placé sur un autel en marbre, à gauche du banc de communion.

Que le culte de la Vierge miraculeuse fut en honneur au début de ce XlX siècle, se prouve suffisamment par les diverses publications de cette époque; d'abord des images représentant la Pieta, reproductions sur soie et sur papier ordinaire elles portent toutes la date de la translation 4 décembre 1803; ensuite en 1804 un opuscule de 27 pages: Origine et Antiquité de la dévotion... à la Consolatrice des Affligés et de la Confrérie … transferee ... à Saint‑Jacques. L'opuscule renferme quelques pages, empruntées au livre de Manigart et donne surtout un aperçu de toutes les indulgences que les membres de la confrérie de la Sainte Vierge peuvent encore gagner maintenant (copie du Sommaire des Indulgences de 1763).

En 1807 parut le petit livre: « Traduction de quelques pièces du Livre de Manigart: Diva Leodiensis Consolatrix... » La brochure de 68 pages, est dédiée à l'illustrissime Monseigneur Baron de Stockhem de Heers, ancien évêque suffragant de Liège.

Dès le début de l'érection de la confrérie à Saint-Jacques, on obtint du Pape Pie VII une nouvelle indulgence plénière pour les fidèles qui, vraiment pénitents, confessés et communiés, visiteront dévotement l'église paroissiale de S. Jacques au jour de la fête des Sept Douleurs de la Vierge Marie le vendredi avant le Dimanche des Rameaux.

C'est aussi vers le milieu du XlXe siècle qu'on a légué à la Vierge de Saint‑Remy à Saint‑Jacques les beaux petits chandeliers en argent, spécimens intéressants de l'orfèvrerie mosane du XVllle siècle (41)

 

La Chapelle de la Vierge à Saint‑Jacques.

Ceux qui visitent l'église Saint‑Jacques admirent tous la belle perspective que la chapelle de la Vierge offre aux spectateurs. Lors de la translation de la statue miraculeuse, cette chapelle était complètement fermée ce n'est qu'en 1884 qu'elle fut ouverte et dédiée à Notre‑Dame de Saint-Remy.

Les deux autels en marbre, qui sont maintenant relégués au fond de l'église, se trouvaient à cette époque devant les chapelles latérales du choeur et en fermaient complètement l'entrée. Cet arrangement malheureux fut l'oeuvre de l'abbé Rennotte (1741-1763): il détruisit le beau jubé en marbre, érigé à l'entrée du choeur, en détacha les deux autels et les transporta en face des nefs latérales, masquant complètement les arcades des chapelles; de même, dans le choeur de l'église, il ferma au moyen de boiseries les baies des chapelles latérales (42).

C'était sur l'autel de gauche que reposait la statue de Notre‑Dame de Saint‑Remy.

Vers la fin de 1883, M. le Doyen Schoolmeesters voulut dégager les chapelles. Celle de gauche était dans un état pitoyable. Lorsque les paroissiens apprirent qu'on allait la dédier à l'image miraculeuse de Notre‑Dame, « les dons affluèrent aussiMl » (43).

M. Helbig restaura le tableau qui décore le fond de la chapelle: La Resurrection de Notre‑Seigneur, par Denis Pesser (43). En mars 1884, on installa la table d'autel; le retable en bois sculpté fut livré au mois de mai 1885. L'autel figure ainsi la série complète des sept Douleurs de Marie l'image miraculeuse, deux bas reliefs et quatre tableaux peints aux faces intérieures des volets (44)

La piété actuelle des fidèles a ménagé ainsi à la Vierge de Saint‑Remy une chapelle digne et bien ornée, tout comme jadis les paroissiens de Saint‑Reiny contribuèrent généreusement à reconstruire le sanctuaire de Notre‑Dame.

Le dimanche 16 août 1886, Monseigneur Warblings, vicaire général, bénit solennellement en l'honneur de la Vierge une couronne précieuse. Celle‑ci, confectionnée avec les bijoux de Mme E. Massart, est en or et rehaussée de brillants, d'améthystes et d'autres pierres précieuses. Plusieurs fois la dévotion des fidèles a encore enrichi la couronne de pierreries (diamants, brillants, perles).

 

La Procession septennale.

La procession paroissiale revêt tous les sept ans un éclat particulier: ce n'est qu'à cette occasion-là qu'on porte dans les rues de notre paroisse Saint‑Jacques la statue miraculeuse de la Vierge.

Entre autres, nous extrayons de La Gazette de Liège les comptes rendus suivants:

La procession septennale en 1890 fut « plus belle et plus nombreuse que les autres années et favorisée par un temps à souhait. »

En 1897, la Gazelle constata que la procession fut absolument remarquable par sa richesse et par sa piété »; elle nous dit que toutes les rues étaient gentiment décorées, mais « les rues Saint‑Paul et du Vertbois arrivent en tout premier lieu: c'était vraiment superbe; viennent ensuite les rues du Méry, de l'Évêché, Saint‑Remy, des Croisiers qui méritent aussi une mention spéciale. »

Dans la procession furent « très remarqués les groupes de jeunes filles représentant les neuf choeurs des Anges, les Mystères du Rosaire, sainte Odile et ses compagnes, et les jeunes gens représentant les chevaliers de saint Jacques avec le reliquaire. »

En 1904 et en 1911, la solennité habituelle se déroula avec un éclat tout particulier, comme on s'en souvient. Les rues de la paroisse étaient magnifiquement ornées. C'est à l'occasion de la procession septennale de 1911 que la Confrérie a offert la nouvelle bannière, magnifiquement brodée, dont les sept médaillons rappellent les scènes des Douleurs de Marie.

L'occupation empêcha la solennité habituelle en 1918 malgré la kommandanlur et les défenses officielles, elle sortit pourtant notre procession de guerre, mais réduite à sa plus simple expression. Les jeunes gens portaient la statue miraculeuse; un groupe très nombreux d'hommes escortaient avec leurs flambeaux le Très Saint Sacrement, que portait Sa Grandeur Monseigneur Rutten. Sortie par le jardin de la place Rouveroy, la procession fit le tour de l'église et de la place Saint‑Jacques et rentra à l'église sous le regard ému des paroissiens, qui depuis quatre ans étaient privés de toute procession.

Nul doute que les fêtes septennales de 1925 soient dignes des souvenirs glorieux, que nous rappelle l'histoire de la Vierge Consolatrice des Affligés!

 

Octave de la Vierge.

La Confrérie qui, depuis 1763, célèbre l'immaculée Conception comme fête principale, organise chaque année au début de décembre une octave solennelle.

L'année septennale ajoute plus d'éclat encore à ces octaves, dont quelques‑unes méritent une mention spéciale

Le Cinquantenaire de la Translation: Sa Sainteté Pie IX accorda la faveur du Jubilé à cette occasion; les prédicateurs furent Sa Grandeur Monseigneur l'Évêque de Liège et le R. P. Dechamps (qui devint plus tard le Cardinal Dechamps, archevêque). Aux deux dimanches de l'octave, Monseigneur l'Évêque chanta la messe pontificale.

En 1904, du 4 au 11 décembre, on fêta le Centenaire de la Translation à Saint‑Jacques de la statue miraculeuse. On avait reculé cette fête d'une année afin de la faire coïncider avec le Cinquantenaire de la Promulgation du Dogme de l'immaculée Conception. Les offices furent particulièrement solennels: grand'messe du 4 décembre, célébrée par Monseigneur Schoolmeesters ancien doyen, avec assistance pontificale de Monseigneur l'Evêque. Ces fêtes jubilaires eurent un caractère vraiment imposant.

Ces quelques notes historiques parlent particulièrement du culte de Notre-Dame de Saint-Remy aux siècles passés. De nos jours, cette dévotion n'est pas moins en honneur: la Confrérie de Notre-Dame compte de nombreux membres. - Tous les samedis et jours de fête de la Vierge, les offices se font à l'autel de la Mère des Douleurs et les paroissiens aiment à y assister. Notre-Dame d'ailleurs ne cesse d'octroyer à ceux qui recourent à Elle de signalées faveurs.

Pendant la guerre, la statue miraculeuse fut placée à l'entrée du choeur, et, comme le dit la circulaire envoyée récemment en vue de la procession septennale, « si les jeunes gens de la paroisse, qui pendant la guerre remplissaient au front leur devoir patriotique, ont été particulièrement protégés, nous croyons devoir l'attribuer à Notre‑Dame de Saint‑Remy que chaque jour durant les hostilités nous avons invoquée en leur faveur. Aucune paroisse de la ville ne fut sous ce rapport aussi favorisée que la nôtre, qui comptait cependant de si nombreux jeunes gens au front. »

Veuille Notre‑Dame, Consolatrice des Affligés, agréer l'hommage de notre piété filiale et continuer à la paroisse Saint‑Jacques ses faveurs et sa protection maternelle.

Liège, le 1er Mai 1925.

 

 

Quelques pièces justificatives.

 

Miracles, ou faveurs grandes qui se sont faicts par l'intercession de la Très‑Glorieuse Vierge Marie honnorée en son image soubs le titre de Nostre Dame de Consolation en l'église paroissiale de Sainct‑Remy en la cite de Liege.

 

Publiez par l'authorité de Monsieur le grand Vicaire et imprimez à Liege chez Jean Tournay imprimeur juré.

 

PREMIER MIRACLE.

Pierr de Chasteau, filz Jean de Chasteau et Jeanne Monbron honnestes bourgeois de Liege, aagé de six ans ou environ, a esté cinque ans entières totalement impotent et immobile de ses jambes, ne pouvant en aucune façon s'ayder d'icelles, ny marcher dessus, non plus qu'un drap mouillé, et comme s'il n'en eust point, se veautrant parmy la terre. Mesme il sembloit, voyant ses jambes, qu'il n'y eust point d'os, ainsi qu'il les demenoit et manioit avec ses mains.

Lesdits parents entendant les miracles, que Dieu faisoit en l'église de Sainct‑Remy par l'entremise favorable de sa saincte Mère, proposèrent de faire quelque dévotion en ladicte Eglise, et y continuer une neuvaine devant l'Image Douloureuse de Nostre Dame, laquel résolution ils mirent en exécution et portèrent ledict Pierre, honnorans illec et fondants leurs coeurs et priants très instamment devant ladicte Image Nostre Dame de Consolation qu'il luy pleust d'intercéder pour la guérison dudict Pierre, si c'estoit la volonté de Dieu, et n'eurent pas plustost commencé ceste dévotion et neuvaine que ledict Pierre commença à sentir ses jambes se fortifier peu à peu, tellement qu'ils luy firent faire des potences, avec lesquelles, petit à petit, et de jour à aultre ledict jean, sa femme, Catherine leur servante et aultres voisins virent et apperceurent qu'il melioroit, et se supportoit de mieux en mieux sur ses jambes, lesquelles sont devenues plus fortes et roides, si bien qu'après quelque peu de temps ledict Pierre par quelque instinct de Dieu dit audict Jean son père, à sa mère, à ladicte Catherine, et à touts de la maison, qu'il voulait estre importé en ladicte église de Saint‑Remy et laisser illecque ses potences pour estre mises devant l'Image de ladicte Vierge. Donc les susnommez esmeus des parolles dudict enfans se résolurent de faire encore une neuvaine en ladicte Eglise, et y porter ledicte Pierre, lequel, grâce à Dieu, laissa ses potences, et marcha entièrement et retourna en la maison, et marche encore, et se prend à courir avec les aultres enfants non sans grande admiration des voisins, et d'un monde de gens d'honneur, qui ont cognu le garçon, admirant la main toute puissante de Dieu, et de sa bénite Mère.

 

SECOND MIRACLE.

La Saincte Vierge se monstre véritablement Mère de touts les Chréstients, elle oblige tout le monde, elle veult que sa miséricorde, ainsi que la lumière du Soleil, soit un bien universel; les petits enfants mesme treuvent acces à ses bonnes graces, de quoy l'exemple suivant nous donnera encore tesmoignage. Jeanne Ponsard, fille de Daniel Ponsard et de Marguarite Belaire, honnestes bourgeois de Liège, aagée présentement de sept ans, ou environ: la dicte Jeanne depuis sa naissance jusques à l'étage de cinque ans et demy ou environ n'a sçeu aucunement se porter sur ses jambes, non plus que si elle n'en avoit point, se tramant parmy la terre sur ses mains (lesquelles estoyent bien souvent déplayées) tellement qu'au dict aage et temps de cinque ans et demy, le dict Daniel et parens furent d'advis de luy faire dresser des potences, afin que par le moyen d'icelles elle esprouvasse à se porter, ce qu'elle faisoit avec grandissime difficultè du commencement, ayant par continuation apprins à se porter sur icelles, ne se pouvant aultrement aulcunement porter ny ayder, de sorte qu'elle donnoit compassion à ceulx qui regardoient: La grande Mère dudict enfant conseilla audict Daniel son père de la porter à Notre Dame de Sainct Remy, et illecque faire quelque dévotion, et qu'elle esperoit qu'on pourroit par l'entremise de la Vierge recouvrir la santé et guarison de l'enfant. Tellement que ledict Daniel secondant le dessein de ladicte Grande‑Mère, la neuvaine s'est commencée en ladite Eglise de Sainct Remy, et portant chasque jour ledict enfant, dresserent leurs voeux et prières à Dieu, et à la Bénite Vierge Marie pour impétrer sa guarison, si cestoit la volonté de Dieu. Laquelle neuvaine estant finie, ilz ont recommencé une nouvelle avec tel et si heureux succes que, grâces à Dieu et à nostre Dame, leur dicte fille a laissé ses appuis en ladite église de Sainct Remy, disant leur dicte fille au dernier jour de la neuvaine qu'elle retourneroit bien sans appuis à sa maison, ce que, bénit soit Dieu, elle a faict et marche entierement sans appuis, et courre parmy les rues, avec grande admiration de tous les voisins.

Il n'y a rien de tout ce qui a esté dict cy dessus, qui n'ayt esté veu et clairement recognu par tout le voisinage et avéré par plusieurs tesmoins irréprochables, après les depositions des Pères et des Mères, tous juridicquement examinez par ordre expres de Monsieur le grand Vicaire.

Tout cecy avéré et approuvé juridicquement, on a approché Messieurs les Docteurs tant de la Sacrée Théologie que Médecine et aultres hommes devots, lesquels n'ont faict difficulté aulcune de qualifier ces guérisons miraculeuses, et les ont signé les suivans:

Monsieur L. Fromondus Docteur en la S. Th. Professeur des S. Lettres et Doyen de S. Pierre à Louvain.

Monsieur Jacques Pontanus, docteur en la S. Théologie et professeur de Louvain.

Monsieur Piroulle, président du Séminaire de Liège, professeur en la S. Théologie.

Monsieur N. Proenen, licencié en la S. Théologie.

Le R. P. Mathias Hauzeur, liseur jubilé en la S. Théologie.

Le R. P. Carolus de Soy, guardien des Récollects.

Le R. P. Bartolemy d'Astroy, liseur en la S. Théologie.

Monsieur Michel Ophemius, docteur et prof. en médecine en l'Université de Louvain.

Monsieur V. F. Plempius, docteur et professeur en médecine en l'Université de Louvain.

Monsieur Pierre Dorlix, docteur et professeur en médecine en l'Université de Louvain.

Rest de coucher icy l'approbation de mon dict Seigneur le grand Vicaire...

Signatum JEAN DE CHOKIER, chanoine de la Cathédrale de Liège et vicaire général de S. A. Séréniss. Evesque et Prince de Liège etc.

Outre ces deux miracles, le curé Manigart rapporte dans son manuscrit plus de 40 guérisons (dont plusieurs « attestées devant notaire »), obtenues par l'intermédiaire de Notre-Dame de Saint‑Remy. La plupart de ces récits sont précédés d'une petite introduction: nous en donnons ici quelques exemples.

 

UN CAPITAINE PRÉSERVÉ DE LA MORT (45)

Après les biens de fortune, ceux qui nous touchent le plus près sont les biens du corps qui consistent principalement en la vie et bonne santé. Et de fait aijez les richesses de tous les Monarques de la terre, ayant le corps atteint de maladies ou estant en peril evident de mort, que vous profiteront-elles, puis que vous n'en pouvez pas jouijr? Les vins exquis, et les mets friands ne profiteroient pas, et encore que l'on les souhaiteroit, il s'en faut priver - veuille, non veuille - pour pouvoir retourner en santé par une longue diette. Il faut avaller les breuvages, et les pillulles ameres; il faut endurer les saignées, et les ventouses avec des pamoissons, et les autres tortures de la chirurgie: il faut epuiser sa bourse aussi bien que les veines, et bien souvent sans proufit. Voulez vous espargner vos escus, et ne pas sentir les mains cruelles nij l'amertume cruelle des recipés des Medecins? il ne faut que recourir à Nostre Dame, la Mère de Consolation, comme fit un genereux soldat Monsieur le Capitaine de Mani...

 

UNE FILLE GUERIE MIRACULEUSEMENT DES GOUTTES.

Les Medecins et Ceux qui sont attaints de ceste maladie sçavent bien que les gouttes sont difficiles a guérir par medicamens, et qu'il est très‑facile a Dieu de les guerir. Ce que l'exemple suivant nous temoignera...

 

UN SOURD REÇOIT L'OUYE.

Un ieune homme, Guileaume Daime, surnommé Le Cock, natif de Liege, avoit perdu l'ouye des deux oreilles, et avoit endurè plusieurs annees ceste incornmoditè, lors qu'il promet de faire quelque devotion à Nostre Dame de Consolation. Un jour comme il estoit dans l'Eglise de la mesme Nostre Dame à Sainct Remy, et la priant pendant la grande messe, qui se chantoit à son honneur, il sembla qu'on luy donna comme un coup de canon aux oreilles, et recupera l'ouye, et entendit les Musiciens chanter à la dicte messe, et retourna à sa maison: ses parents ne pouvant assez admirer la puissance de la tressaincte Vierge Marie, Mère de Dieu et Consolatrice des Affligez.

 

Chanson spirituelle à l'honneur de la Glorieuse V. Marie,

honorée en son image miraculeuse dans l'égIise de N, D. de St. Remy, à Liège.

 

Placard in‑fol, à 2 col., imprimé vers 1647.

Sur le chant Vous ne voulez, belle, que je vous baise…

 

Ou allez vous si viste et si joyeuse

Dessus le point du jour?

Qui vous esmeut, ô Vierge glorieuse,

D'abandonner ainsi vostre séjour!

 

Elle s'en va visiter sa Cousine

Or que l'ange des Cieux

Luy annonça que par faveur divine

Elle a conceu un enfant gracieux.

 

Ne voy-je pas des longues troupes d'Anges

Bavoller alentour,

Qui la suivans, ses plus hautes louanges

A double choeur répètent tour a tour?

 

Phoebus soudain redouble sa lumière

Jaloux de sa splendeur!

Il sçait desia que c'est son Empérière

Qui dans le sein porte son Créateur.

 

Tous les oyseaux, pour lui prester hommage,

Viennent de toutes parts,

Chantent son los, & pour lui faire ombrage,

Volent tousiours pardessus elle espars.

 

Vois-tu mon coeur? toute chose conspire

A son contentement!

L'air plus serain exhale un doux Zéphire

Pour luy donner du rafrechissement!

 

Arrivant là (dit-elle) Dieu vous garde

Ma cousine, ma Soeur.

Elisabeth, admirant la regarde,

Et luy respond, d'où me vient ce bon‑heur?

 

D'où ce grand bien que la féconde Mère

De mon Dieu mon Seigneur

Vienne vers moy? ma cousine tres chère,

Pourquoy donc vous me faire tant d'honneur?

 

Ce doux salut me flattant les oreilles

Je ressens mon enfant

Qui dans mon sein, ô Dieu, quelles merveilles,

Tressaut d'amour comme tout triomphant?

 

Ayant finy chacune sa parole,

Avant que deviser

De leurs faveurs, l'une l'autre s'acolle,

Et s'entre‑donne un aymable baiser.

 

Quel doux plaisir de voir tant de caresses,

Et tant d'embrassemens!

Leur âme saut d'amour & d'allégresses

Dans les ardeurs de leurs embrassements

 

Ne voy-ie pas dedans ces entreveuës

Leurs coeurs comme ravis?

Et discourant de leurs graces reçeuës

Pasmer d'amour, dedans leurs saincts devis!

 

Que fait alors le pieux Zacharie?

Il ne se peut saouler

D'ouyr & voir sa Cousine Marie,

Ne pouvant pas de la bouche parler.

 

Elisabeth en ses divines flammes

S'escrie tout soudain:

Vierge, tu es bénite entre les femmes,

Pareillement le cher fruit de ton sein.

 

La Vierge a dit : « MON AME MAGNIFIE

LE SEIGNEUR TOUT PUISSANT:

D'ESPRIT IOYEUX, MON DIEU lE GLORIFIE,

QUI ME REGARDE & ME VA BENISSANT. »

 

A Liège, chez jean Tournay, Imp, juré à St Augustin.

 

Chanson spirituelle.

 

Les impotents et les malades

Ont leur recours

Et soubs les rays de vos oeillades

Cherchent secours

Depuis qu'en ce havre de grace (bis)

A Sainct Remy

Vous nous premonstrè la bonace

Fin des ennuyts.

 

Douleurs et angoisses

de la Saincte Vierge Mère de Consolation

Sur la morte de son Filz.

 

Sur le chant: Adieu, Nimphes des bois, etc.

 

Quand ceste Vierge sceut

Que son chere enfant fust

Entre les mains cruelles

Des miserables luifs,

Reçeut cent mils ennuys

De ces tristes nouvelles.

 

Alors diligemment

Par tout lerusalem

De douleurs transportée

Alloit partout cherchant

lesus Christ son enfant

Sa divine portée.

 

Partout la demandé

Et si bien la cherché

Avec douleur amere

Qu'en la fin la trouvé

Sur la croix eslevè

Sur le mont de Calvaire.

 

Helas quelle douleur

Saisit son pauvre coeur

Voyant la dure peine

Que lesus enduroit

Et de si bon coeur souffroit

Pour la nature humaine.

 

Son chef jadis tant beau

Estoit jusqu'au cerveau

Transpercé d'une espine;

Les pieds et mains clouez

Et de tous les costez

Son corps estoit en ruine.

 

Le contemplant ainsi

Elle eust le cour transi

Et tombat presque morte;

Mais l'Apostre sainct lean,

Mignon de son enfant,

Doucement la conforte.

 

Quand le doux lesus Christ

Eust rendu son esprit

Es mains de Dieu son pere,

Le corps fut descendu

Et aussi tost rendu

A sa dolente Mère.

 

Elle alloit embrassant

Ce pauvre corps sanglant

D'une amour si extreme

Qu'on eust dict mesmement

Qu'elle alloit promptement

Trespasser elle‑mesme.

 

Comblée de douleurs

Elle arrousoit de pleurs

La face ensanglantée

De lesus son enfant,

Que la crasse et le sang

Avoit defiguree.

 

Or, a Dieu ie vous dis

La bouche de mon filz,

O bouche debonnaire,

Que ne me nommez-vous

Encore devant tous

Une fois vostre mère.

Ainsi se lamentoit

Et se desconfortoit

Ceste Vierge tressaincte

Et tant son filz baisoit

Que sa face en estoit

De son sang toute teinte.

Mais, s'approchant la nuict,

Ses amis luy ont dict

Que vostre oeil se reserre.

Il est ores besoing

Que nous ayons le soing

Mettre lesus en terre.

Plus on luy en parloit

Plus elle l'embrassoit

Et en pleurant s'escrie:

le vous prie, mes amis,

Qu'avecque mon cher filz

le sois ensevelie.

Or sus peuple Chrestien,

Supplions humblement

La saincte Vierge Mere

De prier son enfant

Nous mettre au firmament

A nostre heure derniere.

 

On récitait aussi à l'église S. Remy Les Litanies des Douleurs de Nostre Dame (46), dont certaines invocations sont particulièrement touchantes

 

Vierge pleine de peines et d'amertumes - Priez pour nous.

Vierge désolée sur la prise de vostre filz,

Vierge esplorée à l'ouye de la sentence de sa mort,

Vierge qui l'avez pleuré portant sa croix,

Vierge qui l'havez suivi au Calvaire,

Vierge qui l'havez contemplé nud, couché sur la croix,

Vierge, qui avez ouy ses complaintes en Croix,

Vierge, qui l'havez veu tout alterè de soif,

Vierge, qui avez essuez son sang et crachats,

Lis entre les espines,

 

Oraison pour prier la Vierge Marie Mère de consolation, avec grande affection en toute nécessitez ou affliction (47)

 

  O Mere de consolation Souveraine Emperiere, et Reine absolue des Cieux et de la terre, ne scaurois‑ie avoir une faveur de vous? N'est‑ce pas vous, très Saincte Dame, qui avez estè faicte Mere de DIEU, et Reine du Ciel afin que les pauvres pecheurs, et tous les affligez trouvassent a qui avoir recours en leurs ennuits, et necessitez? N'est‑ce pas vous, qui avez estè faicte l'Advocate generate de la Cour du Paradis pour prendre en main la cause des pauvres orphelins necessiteux et affligez? Il est ainsi, tout cela est de votre faict. Secourez moy donc, car je ne cesseray de me plaindre a vous.

  O Mere admirable, combien de miracles avez vous faicts et faictes tous les jours pour monstrer que vous estez la Tutrice, et l'Advocate des pauvres nécessiteux? Combien en avez‑vous délivrez de très grand danger? Combien en avez‑vous délivrè de la mort? Combien en avez‑vous tirè du chemin d'Enfer? le nombre en est sans nombre. Ayez donc pitié de moy, et me regardez de vostre oeil de Consolation.

  J'advoue donc, très douce MARIE, que je suis la plus misérable créature, et la plus meschante, qui ait jamais estè, et qui soit en tout le monde, et ne mérite d'obtenir quelque grace de vous. Mais de qui estez vous Advocate? N'est‑ce pas des pecheurs? Ce pourquoy le dis, que moy estant très meschante, et qu'ayant infiniment offencè vostre Filz, que vous devez prier pour moy, m'ayder, et me prendre en vostre protection. Hélas ma très douce Mere, escoutè moy, et tenez compte de mes humbles prières, ne me laissé partir de vous troublée et désolée, comme vous voyez. N'auray‑ie aulcune consolation de vous? Que cela ne se die jamais de vous très débonnaire Dame, le vous en prie pour vostre honneur, et pour l'honneur de vostre Filz; je vous en supplié par ses playes, par son sang, par toutes voz douleurs, et mérites...

Délivrez moy, ô MERE DE CONSOLATION, vous voyez mes afflictions, et mes necessitez. Assistez moy et vous m'obligerez de publier plus que jamais voz débonnairetez, et graces inenarrables, et convieray tout le monde de vous honnorer, servir et aymer dans vostre Eglise de Sainct Remy et en tous lieux, comme Mère très‑pitoyable des pauvres affligez. Amen.

 

 

 

IMPRIMATUR:

Leodii, / Maii, 1925.

H. PETERS, vie. gen.

 

(1) Dans une charte de 1187, on dit capeLla S. Remigli.

(2) Cf L. Lahaye. Les paroisses de Liège, B. I. A. L., t. XLVI pp. 21 et 25

(3) En 1656, le curé se plaint que l'abbé de Saint‑Jacques n'exécute plus ses engagements: il s'y refuse depuis deux ans, dit‑il.

(4) Manuscrit, p. 22. Cf. Miracles ou Faveurs grandes.

(5) Cette date est connue par le fait suivant, que Manigart rapporte dans son manuscrit:   « C'este une fille de 21 ans, appelée Marie, la quelle environ l'an 1643, pour gaigner sa vie, portait des pierres pour l'édification de l'église de Notre Dame de Sainct Remy »; Cette jeune fille « porteresse ou botresse », qui faisait donc l'office d'aide‑maçon, fut victime d'un accident: l'échafaudage s'écroula et la malheureuse fut ensevelie sous les pierres. « Elle invoca incontinent l'assistance de Nostre Dame de Consolation, et ne fut nullement blessée, ny intéressée en son corps, mais seulement estourdie, et comme assoupie, et deux heures après, travaillat encore comme sy elle n'eust eu aucun mal. »

(6) L'entrepreneur Henri le Mignon, de la rue des Carmes.

(7) Cf. Schoolmeesters, B. S. A. H. L., t. X, p. 379.

(8) A. E. L. Reg. Reconstruction de l'église, 1647-49. f° 31 v°0.

(9) Liasse: « Reconstruction »: quittances.

(10) Reg Reconstruction 1654-67, passim

(11) Mgr Schoolmeesters, ibid.

(12) Il avait du avouer à la visite archidiaconale précédente: Tota ecclesia indiget reparatione necessaria et urgente.

(13) Petit feuillet imprimé: Cher et Dévot Lecteur.

(14) Le tableau avait été commandé le 5 mai 1650. Liasse: Reconstruction.

(15) Un de ces calices est actuellement au trésor de Saint‑Jacques. Le doyen de Saint‑Jean l'Evangéliste à Liège en fit cadeau jadis à l'église Saint‑Remy.

(16) Pastor habet domun pastoralem bonae structurae cum hortulo

(17) Reg. arch. 1685: habet domum pastoralem, cujus caducitati subveniens impendit ultra centum lmperiales de suo.

(18) Louis‑François Denis, devenu curé de Saint‑Remy en 1794. Il y remplissait les fonctions de vicaire depuis 1766.

(19) Actuellement l'institut Saint‑Jacques.

(20) Il n'existe pas de vue spéciale de l'église Saint-Remy. Dans « les Délices du Pays de Liège on voit la tour de Saint-Remy émerger à côté du monastère Saint-Jacques. - Cf. vue de Liège, prise des hauteurs de Saint-Gilles. - Le R. P. Christophmaire indique sur le plan terrier la disposition de l'église en forme de croix.

(21) Après la sécularisation de l'abbaye, le chanoine Baral se fit bâtir une maison place Saint-Jacques. Il la laissa par testament à la fabrique d'église de Saint-Jacques: elle sert de presbytère à M. le Doyen. - C'est dans cette maison que fut conservée la statue de Notre-Dame.

(22) Né à Liège, dans la paroisse Saint‑Pholien.

(23) Helbig, La sculpture au Pays de Liège, p. 121.

(24) Voici l'appréciation de Manigart (Diva Leod., p. 6): statua faberrima, miraeque pulchritudinis, quae aspicientes movet objective ad pietatem et peccatorum contritionem.

(25) Arch. État. Par, S. Remy: Testaments.

(26) Supra domum scuti aurei prope pontem arcuum.

(27) A. E. L. Ibid.

(28) Noël Hardy, prédécesseur du curé Manigart.

(29) Payée 19 fl. bb. Reg. Reconstr. 1644-1646, f° 41 v.

(30) Copie de documents relatifs à Saint‑Remy, f° 32.

(31) Manuscrit, p. 79.

(32) Un exemplaire, daté de 1647 et signé G. F. S., se trouve chez M. Mélard, antiquaire. La statuette a gardé son ancienne polychromie.

(33) Reg. 1647-1647, f° 72 V. Donné pour la musique le jour que son Altesse est venue dans nostre Eglise, auquel jour le Suffragan a chanté la messe et le salut: neuf fl. bb.

(34) Manuscrit, p. 65

(35) Manuscrit, p. 109.

(36) Vis. Archid. de 1685.

(37) Ces objets se trouvent maintenant dans le trésor de Saint-Jacques. Transportés au‑delà du Rhin pendant la Révolution française (Voir Leodium 1914, p. 82), ils, furent cédés à Saint‑Jacques lors de la réorganisation des paroisses.

(38) Deux colonnes en argent soutenaient aussi une couronne dorée au dessus du Saint Sacrement.

(39) Renseignement communiqué par M. Lahaye; celui-ci possède un imprimé in-4° de 4 pages, de la procession du 31 juillet 1701.

(40) De l'ancien collier de la gilde il n'y a que l'oiseau de tir en argent doré, qui nous soit parvenu. Les « dix-sept médailles », dont on nous parle en 1763, ont disparu. - On mentionne explicitement l'oiseau parmi les objets envoyés à l'étranger lors de la Révolution française. - Sur le fleuron que tient l'oiseau, on lit l'inscription suivante:

NICOLAS – MIRGVET – ELVS - ROY

FAIT – PRESENT - DE - CECY

26 JVILLET 1749

L'église Saint‑Jacques possède encore un médaillon en argent, large de 15 centimètres il contient une jolie peinture‑miniature représentant la Visitation: la Sainte Vierge accueillie par sainte Elisabeth. Au dos de la plaque est gravé:

F. DESTAIN

CAPITAINE D'ARTILLERIE

DE FEU S. A. S. IOSEPH CLEMT

DUC DE BAVIERE EVEQUE ET

PRINCE DE LIEGE

DE GLORIEUSE MEMOIRE

MAT PEINT ET DONNE A LA CONFRERIE

DE LA VISITATION DE LA Ste

VIERGE DE ST REMY

A LIEGE. L AN. 1747.

(41) Un vase en argent porte l'inscription suivante: Consolatrici Afflictorum in gratiarum actionem propter sanitatem Dnae ex D’Argenteau D'Ochain redditam. 1808.

(41) Mgr Schoolmeesters, Bulletin Paroissial, 1902, p. 80.

(42) Témoignage de M le Doyen Schoolmeesters, ibid p. 88.

(43) Ce tableau porte la date de 1598, Voici l'inscription : Ille qui clausus lapide - custodilur a milite - beato clarus lumine - Victor surgit de funere.

(44) MM. De Bouck et Van Wint ont exécuté les sculptures; M. Hendrichs commença les peintures et M. Helbig les acheva.

(45) Manuscrit, p. 86.

(46) Manuscrit, p. 35.

(47) ibid., pp. 33-34

PLAN DU SITE